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Le départ d’un fils

poésie classique
Le poème ‘Le départ d’un fils’ d’Auguste Brizeux offre une vision poignante des sentiments d’une mère face à l’absence de son enfant. Écrit au 19ᵉ siècle, ce poème résonne profondément avec quiconque a vécu la douleur de la séparation. Par ses vers émouvants, Brizeux explore le lien indéfectible entre parents et enfants, tout en soulignant la mélancolie qui accompagne le passage à l’âge adulte.
Je crois l’entendre encor, quand, sa main, sur mon bras,
Autour des verts remparts nous allions pas à pas:
‘ Oui, quand tu pars, mon fils, oui, c’est un vide immense,
Un morne et froid désert, où la nuit recommence;
Ma fidèle maison, le jardin, mes amours,
Tout cela n’est plus rien; et j’en ai pour huit jours,
J’en ai pour tous ces mois d’octobre et de novembre,
Mon fils, à te chercher partout de chambre en chambre:
Songe à mes longs ennuis! et, lasse enfin d’errer,
Je tombe sur ma chaise et me mets à pleurer.
Ah! souvent je l’ai dit: dans une humble cabane,
Plutôt filer son chanvre, obscure paysanne!
Du moins on est ensemble, et le jour, dans les champs,
Quand on lève la tête, on peut voir ses enfants.
Mais le savoir, l’orgueil, mille folles chimères
Vous rendent tous ingrats, et vous quittez vos mères.
Que nous sert, ô mon Dieu! notre fécondité,
Si le toit paternel est par eux déserté ;
Si, quand nous viendra l’âge (et bientôt j’en vois l’heure),
Parents abandonnés, veufs dans notre demeure,
Tournant languissamment les yeux autour de nous,
Seuls nous nous retrouvons, tristes et vieux époux?’
Alors elle se tut. Sentant mon coeur se fondre,
J’essuyais à l’écart mes pleurs pour lui répondre
Muets, nous poursuivions ainsi notre chemin,
Quand cette pauvre mère, en me serrant la main:
‘Je t’afflige, mon fils, je t’afflige! Pardonne!
C’est qu’avec toi, vois-tu, l’avenir m’abandonne:
En toi j’ai plus qu’un fils, oui, je retrouve en toi
Un frère, un autre époux, un coeur fait comme moi,
A qui l’on peut s’ouvrir, ouvrir toute son âme;
Pensif, tu comprends bien les chagrins d’une femme:
Tous m’aiment tendrement; mais ta bouche et tes yeux,
Mon fils, au fond du coeur vont chercher les aveux.
Pour notre sort commun, demande à ton aïeule,
J’avais fait bien des plans, – mais il faut rester seule;
Nous avions toutes deux bien rêvé, – mais tu pars;
Pour la dernière fois, le long de ces remparts,
L’un sur l’autre appuyés, nous causons, – ô misère!
C’est bien, ne gronde pas… Chez la bonne grand’mère
Rentrons. Tu sais son âge: en faisant tes adieux,
Embrasse-la longtemps… Ah! nous espérions mieux.’
Ce poème nous pousse à réfléchir sur les liens familiaux et la tristesse que peut engendrer le départ des êtres chers. N’hésitez pas à explorer d’autres œuvres d’Auguste Brizeux pour plonger plus profondément dans son univers poétique.
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