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Mélancolie sous un temple ancien

Mélancolie sous un temple ancien
Plongez dans l’histoire de Lucien, un artiste tourmenté dont l’âme cherche refuge dans les ruines d’un temple ancien. Ce poème explore les thèmes de la création artistique, de la quête de vérité et du sacrifice intérieur. À travers des images poignantes et des émotions profondes, il nous invite à réfléchir sur le coût de l’authenticité et la fragilité de l’être humain face à l’infini.
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Le Dernier Soupir du Pinceau

Au creux d’un vallon où le temps s’épuise,
Un homme, drapé d’ombres et de brume,
Marche d’un pas lourd vers l’horizon qui fuit.
Ses doigts, jadis agile danseur sur la toile,
Étreignent un carnet vide, miroir de l’âme
Où les couleurs ont déserté l’aube incertaine.
Il se nomme Lucien, artiste au regard d’orage,
Dont les toiles, dit-on, pleurent des larmes d’encre
Quand les salons bourdonnent de rires sans visage.

Un soir, las des quolibets et du vin aigri,
Il suit une légende murmurée par les sources :
Un temple oublié, gardien de secrets antiques,
Où les murs, dit-on, respirent encore l’éternel.
Ses pieds meurtris gravissent les sentiers de pierre,
Traversent des forêts où les chênes chuchotent
Des noms effacés par les siècles voraces.
Enfin, sous la lune pâle comme un linceul,
Se dresse l’édifice, cicatrice dans la nuit,
Ses colonnes brisées telles des vertèbres mortes.

L’artiste pénètre dans la nef silencieuse
Où l’air vibre du souvenir des hymnes perdus.
Ses mains frôlent les fresques aux dieux évanouis,
Visages érodés par les baisers du temps,
Et soudain, un souffle — ni vent ni murmure —
Glisse entre les pierres, porteuse d’une voix :
« Chercheur de vérités enfouies sous les cendres,
Es-tu prêt à payer le prix des songes vrais ?
Ici, chaque artéfact est un miroir brisé
Où se reflète l’âme qui ose s’y contempler. »

Lucien, étreint par un frisson prophétique,
S’avance vers l’autel où gît un pinceau d’or.
L’objet scintille, cœur battant dans l’obscurité,
Appelant ses doigts avides de renaissance.
À son contact, un éclair déchire sa nuit intérieure :
Visions de citadelles peuplées d’ombres sublimes,
De cieux où dansent les nuances interdites,
Et au centre, un visage — le sien — démultiplié,
Déformé par les masques de ceux qui jugèrent.
« Crée ! » ordonne la voix, « Mais souviens-toi :
L’art vrai est un duel avec le gouffre de l’être. »

Il peint. D’abord timide, puis furieux,
Sous les voûtes témoins de son agonie sacrée.
Ses couleurs jaillissent en fleuves tourmentés,
Cristallisant ses doutes, ses colères, ses extases.
Les murs absorbent chaque trait, chaque sanglot,
Et le temple s’anime, écho de son propre cœur :
Les colonnes frémissent, les mosaïques sanglotent,
Tandis qu’apparaît, gradualement, une fresque immense —
Portrait d’un homme nu face à l’infini vide,
Les mains tendues vers une lumière qui recule.

Trois nuits, trois jours, Lucien combat la matière,
Buisson ardent où se consume son identité.
Parfois, il parle aux fantômes de marbre :
« Voyez-vous cette teinte, ce clair-obscur qui ment ?
J’ai cru que l’art était un pont entre les mondes,
Mais je ne suis qu’un fou parlant aux murs sourds. »
Une statue de déesse, aux yeux de jade, semble
Esquisser un sourire mélancolique :
« L’écho n’est-il pas preuve que la voix existe ? »

Au matin du quatrième jour, quand l’œuvre achève,
Un silence de cathédrale enveloppe les lieux.
La fresque palpite, organisme vivant et cruel,
Montrant Lucien enfant, rêvant devant un couchant,
Puis adolescent flagellé par les railleries,
Enfin homme, silhouette courbée sous le fardeau
De voir trop loin dans l’abîme des couleurs.
Au centre, un vortex où tournoient ses espoirs,
Avec, inscrit en lettres de feu et de cendre :
« Je suis Celui qui Donne et Celui qui Reprend. »

Soudain, le pinceau d’or se brise en mille éclats,
Et le temple entier tremble sur ses bases mortes.
Lucien, hagard, voit ses pigments se consumer,
Ses traits s’effacer comme neige au soleil cruel,
Tandis que la voix tonne, implacable et douce :
« Ton chef-d’œuvre était toi, fragile et éphémère.
Maintenant que tu l’as vu, comment continuer ? »
Il veut crier, mais sa bouche est pleine de cendres,
Ses mains, transparentes, saisissent vainement l’air
Où dansent les particules de son âme dispersée.

Dehors, l’aube se lève, indifférente et belle.
Le temple n’est plus que ruines parmi les ruines,
Et quelque part, un carnet aux pages vierges
Roule au gré du vent, promesse sans héritier.
Seul persiste, gravé sur un fragment de pierre,
Un verset que les pluies laveront à jamais :
« Ici mourut deux fois un homme nommé Lucien :
Une fois par le monde, une fois par lui-même.
Priez pour ceux qui portent les couleurs du gouffre,
Et marchent, poignardés par la beauté du monde. »

Les bergers qui passent, bien des années plus tard,
Racontent qu’en plein midi, quand le soleil ment,
On entend parfois un rire mêlé de sanglots
Parmi les décombres où rôdent les hiboux.
Ils disent aussi que les murs, à minuit,
S’illuminent de fresques fantômes —
Portraits d’une humanité nue, superbement triste,
Dont les yeux suivent les vivants avec pitié,
Comme pour dire : « Voyez, mais ne touchez pas.
L’art vrai est un adieu déguisé en renaissance. »

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Lucien, comme tant d’artistes, a payé le prix ultime pour voir la vérité de son âme. Son histoire nous rappelle que l’art véritable est un miroir brisé, reflétant à la fois la beauté et la douleur de l’existence. En contemplant ses ruines, nous sommes invités à nous demander : sommes-nous prêts à affronter nos propres abîmes pour créer quelque chose d’éternel ?
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Auteur: Jean J. pour unpoeme.fr
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