Le genre poétique du Zajal
Le Zajal (arabe : زجل) est une forme traditionnelle de poésie strophique orale déclamée dans un dialecte colloquial. Le premier poète de Zajal enregistré est Ibn Quzman d’al-Andalus, qui a vécu de 1078 à 1160. La plupart des chercheurs considèrent que le Zajal arabe andalou, dont la versification par accent-syllabe diffère significativement du mètre quantitatif de la poésie arabe classique, constitue une forme d’expression adaptée des traditions poétiques populaires des langues romanes vers l’arabe—d’abord au niveau folklorique, puis par des poètes lettrés tels qu’Ibn Quzman.
Il est généralement admis que les ancêtres précoces de la poésie dialectale levantine sont le Zajal andalou et le muwashshaḥah, apportés en Égypte et dans la Méditerranée orientale par les Maures fuyant l’Espagne aux XIIIe et XIVe siècles. Un maître ancien du Zajal égyptien est le Zajjāl Abu ʿAbd Allāh al-Ghubārī du XIVe siècle. Bien que les origines du Zajal soient anciennes, il peut être retracé au moins jusqu’au XIIe siècle. Aujourd’hui, il est le plus vivant au Levant—particulièrement au Liban, en Palestine, en Syrie, et en Jordanie, où des praticiens professionnels du Zajal peuvent atteindre des niveaux élevés de reconnaissance et de popularité—ainsi qu’au Maghreb, en particulier au Maroc et en Algérie.
Le Zajal est semi-improvisé et semi-chanté et est souvent présenté sous la forme d’un débat entre les zajjalin (poètes qui improvisent le Zajal). Il est généralement accompagné d’instruments de percussion (avec, occasionnellement, un instrument à vent, par exemple, le ney) et d’un chœur d’hommes (et plus récemment, de femmes) qui chantent des parties des vers.
Les poètes égyptiens connus pour leur utilisation littéraire de la forme populaire du Zajal incluent Yaqub Sanu, ‘Abd Allah al-Nadim, Bayram al-Tunisi, et Ahmed Fouad Negm. Des zajjalin libanais bien connus incluent Zein Sh’eib, Talih Hamdan, Zaghloul alDamour, Moussa Zgheib, Asaad Said, et Khalil Rukoz.
Selon le Lexique de Lane, le verbe racine zajila signifie divers éléments tels que faire un son, émettre un cri, exprimer une émotion, jouer ou s’amuser. Adnan Haydar, un érudit spécialisé dans la langue et la littérature arabes, cite le lexique d’Ibn Manzur du XIVe siècle Lisan al-Arab pour attribuer la signification de « lever la voix en chantant » au verbe racine zajala. En se concentrant sur l’une des significations données par Lane, un autre érudit soutient que l’étymologie du Zajal est liée au jeu et au divertissement musical.
Les caractéristiques du Zajal
La poésie Zajal est écrite en arabe colloquial d’al-Andalus plutôt qu’en arabe standard. Le Zajal diffère de la poésie arabe classique en ce sens que le premier a une forme strophique tandis que le second est monorhymé. La versification par accent-syllabe du Zajal, ou mètre qualitatif, diffère également significativement du mètre quantitatif de la poésie arabe classique.
La plupart des chercheurs considèrent que le Zajal arabe andalou constitue une forme d’expression adaptée des traditions poétiques populaires des langues romanes vers l’arabe—d’abord au niveau folklorique, puis par des poètes lettrés tels qu’Ibn Quzman. Les schémas de versification du Zajal andalou ressemblent à ceux des cantigas galiciennes, des villancicos castillans, des dansas italiennes, et des rondeaux et virelais français.
Le Zajal libanais
Le Zajal libanais est une forme de poésie semi-improvisée, semi-chantée ou déclamée dans le dialecte levantin libanais. Ses racines peuvent être aussi anciennes que la poésie arabe pré-islamique, mais diverses manifestations similaires du Zajal peuvent être retracées à l’Espagne maure du Xe au XIIe siècle, et spécifiquement au poète colloquial Ibn Quzman. Le Zajal a des liens étroits en prosodie, en livraison, en forme et en esprit avec diverses traditions de poésie colloquiale semi-chantée, y compris des traditions apparemment disparates comme la poésie nabati et celle des troubadours.
De nombreuses cultures du Proche-Orient, d’Arabie et de la Méditerranée (y compris la Grèce, l’Algérie, le Maroc, l’Espagne et le sud de la France) ont eu, ou ont encore, des traditions riches de poésie colloquiale semi-improvisée et semi-chantée, qui partagent certaines caractéristiques avec le Zajal libanais, telles que le duel verbal (par exemple, le jeu parti des troubadours), l’utilisation de tambourins ou d’autres instruments de percussion minimalistes, et un chœur chantant d’hommes (Reddadi, en libanais) qui répètent des vers clés ou des refrains récités par les poètes.
Métriques du Zajal
Il semble y avoir un consensus parmi les quelques chercheurs qui ont sérieusement étudié les métriques du Zajal selon lequel il suit deux systèmes métriques distincts. Un système métrique est quantitatif et se base clairement sur certains des stricts mètres dits Khalili de la poésie arabe classique (par exemple, le m3anna et les formes connexes scannent selon les mètres classiques sari3, rajaz et wafir), et l’autre est accentué-syllabique (par exemple, de nombreuses sous-formes du qerradi sont clairement basées sur des métriques syriaques). Les deux types de métriques dans le Zajal sont sujets à une altération fluide par l’accentuation musicale et la syncope, ce qui est possible grâce à la malléabilité du colloquial.