Le pantoum : Une forme poétique unique
Le pantoum est une forme poétique dérivée du pantun, une forme de vers malaise, plus précisément du pantun berkait, qui consiste en une série de quatrains entrelacés.
Le pantoum se distingue par sa structure répétitive, similaire à celle d’une villanelle. Il est composé d’une série de quatrains où les deuxième et quatrième vers de chaque strophe sont répétés comme premier et troisième vers de la strophe suivante. Ce schéma se poursuit pour un nombre quelconque de strophes, à l’exception de la dernière strophe, qui présente un schéma de répétition différent. Les premier et troisième vers de la dernière strophe reprennent les deuxième et quatrième de la strophe précédente ; le premier vers du poème devient le dernier vers de la dernière strophe, et le troisième vers de la première strophe est le deuxième vers de la dernière. Idéalement, le sens des vers change lorsqu’ils sont répétés, même si les mots restent exactement les mêmes : cela peut se faire par un changement de ponctuation, un jeu de mots ou tout simplement en recontextualisant.
Une forme classique de pantoum comprend quatre strophes, bien que plus de strophes puissent être utilisées. Dans la dernière strophe, les vers un et trois de la première strophe peuvent être répétés, ou de nouveaux vers peuvent être écrits. La structure du pantoum est donc la suivante :
Strophe 1
A
B
C
D
Strophe 2
B
E
D
F
Strophe 3
E
G
F
H
Strophe 4
G
I (ou A ou C)
H
J (ou A ou C)
Le pantoum est issu du pantun berkait et une traduction anglaise de ce dernier est apparue dans l’ouvrage de William Marsden, A Dictionary and Grammar of the Malayan Language, en 1812. Victor Hugo a publié une version française non rimée de ce poème, traduite par Ernest Fouinet, dans les notes de Les Orientales (1829), et des poètes français ont commencé à tenter de composer leurs propres pantoums. Leconte de Lisle a publié cinq pantoums dans ses Poèmes tragiques (1884).
Il existe également le pantoum imparfait, où la dernière strophe diffère de la forme décrite ci-dessus et où les deuxième et quatrième vers peuvent être différents de tout vers précédent. Le célèbre poème de Baudelaire, « Harmonie du soir », est souvent cité comme un exemple de cette forme, bien qu’il soit irrégulier. Les strophes ont un schéma de rimes ABBA plutôt que l’ABAB attendu, et le dernier vers, qui devrait être le même que le premier, est original.
Des poètes américains tels que Clark Ashton Smith, John Ashbery, Marilyn Hacker, Donald Justice (avec « Pantoum of the Great Depression »), Carolyn Kizer et David Trinidad ont également exploré cette forme, tout comme la poétesse irlandaise Caitriona O’Reilly. Le numéro de décembre 2015 de First Things a présenté un pantoum de James Matthew Wilson, « The Christmas Preface ».
Claude Debussy a mis en musique « Harmonie du soir » de Charles Baudelaire dans ses Cinq poèmes de Charles Baudelaire sous la forme d’un pantoum. Peut-être inspiré par cette mise en musique, Maurice Ravel a intitulé le deuxième mouvement de son Trio pour piano « Pantoum (Assez vif) ». Bien que Ravel n’ait jamais commenté la signification du titre de ce mouvement, Brian Newbould a suggéré que la forme poétique se reflète dans la façon dont les deux thèmes se développent en alternance. Neil Peart a utilisé cette forme (avec une différence par rapport au format énoncé ci-dessus) pour les paroles de « The Larger Bowl (A Pantoum) », la quatrième piste de l’album Snakes & Arrows de Rush, sorti en 2007.
Exemple de poème en pantoum
Voici un exemple de pantoum écrit selon les règles de cette forme poétique :
Dans le jardin où le temps s’efface,
Les fleurs murmurent des secrets d’amour,
Le vent doux caresse chaque espace,
À l’ombre des rêves, je m’égare toujours.
Les fleurs murmurent des secrets d’amour,
Leurs pétales dansent sous un ciel étoilé,
À l’ombre des rêves, je m’égare toujours,
Dans ce havre de paix, je veux rester.
Leurs pétales dansent sous un ciel étoilé,
Le vent doux caresse chaque espace,
Dans ce havre de paix, je veux rester,
Dans le jardin où le temps s’efface.
Analyse : Ce poème respecte la forme du pantoum car il est constitué de quatre strophes, chaque strophe ayant le schéma de répétition des vers, comme indiqué. Les vers 2 et 4 de chaque strophe sont repris dans les strophes suivantes, et le sens des mots évolue à chaque répétition, illustrant ainsi la richesse de cette forme poétique.