Il Existe Pourtant…

Il existe pourtant des pommes et des oranges CÃĐzanne tenant d’une seule main toute l’amplitude fÃĐconde de la terre la belle vigueur des fruits Je ne connais pas tous les fruits par cœur ni la chaleur bienfaisante des fruits sur un drap blanc Mais des hÃīpitaux n’en finissent plus des usines n’en finissent plus des files d’attente dans le gel n’en finissent plus des plages tournÃĐes en marÃĐcages n’en finissent plus J’en ai connu qui souffraient à perdre haleine n’en finissent plus de mourir en ÃĐcoutant la voix d’un violon ou celle d’un corbeau ou celle des ÃĐrables en avril N’en finissent plus d’atteindre des riviÃĻres en eux qui dÃĐfilent charriant des banquises de lumiÃĻre des lambeaux de saisons ils ont tant de rÊves Mais les barriÃĻres les antichambres n’en finissent plus Les tortures les cancers n’en finissent plus les hommes qui luttent dans les mines aux souches de leur peuple que l’on fusille à bout portant en sautillant de fureur n’en finissent plus de rÊver couleur d’orange Des femmes n’en finissent plus de coudre des hommes et des hommes de se verser à boire Pourtant malgrÃĐ les rides multipliÃĐes du monde malgrÃĐ les exils multipliÃĐs les blessures rÃĐpÃĐtÃĐes dans l’aveuglement des pierres je piÃĻge encore le son des vagues la paix des oranges Doucement CÃĐzanne se rÃĐclame de la souffrance du sol de sa construction et tout l’ÃĐtÃĐ dynamique s’en vient m’ÃĐveiller s’en vient doucement ÃĐperdument me lÃĐguer ses fruits.