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JOB – poème lyrique
Le poème ‘JOB’ de Pierre Baour-Lormian est une œuvre lyrique captivante qui explore la profondeur de la souffrance humaine face à l’adversité. Inspiré par le récit biblique de Job, ce poème illustre la lutte entre la foi et le désespoir. Écrit au 19ème siècle, il reste une réflexion puissante sur la condition humaine et la perception divine.
Long-temps monarque heureux, père, époux adoré, De l’orient soumis Job reçut les hommages: Nul monarque jamais, de sa gloire entouré, Ne vit autant de jours se lever sans nuages. L’infortune eut son tour: mille fléaux divers Au sein de ses états confondent leurs ravages; La guerre, au vol sanglant, plane sur ses rivages; La famine la suit; les cieux toujours ouverts Vomissent la tempête, et la grêle, et la foudre. Le roi de l’Orient, accablé de revers, Sous les feux éternels voit ses cités en poudre. Des sables de Lybie accourt un vent mortel: Tout tombe, se flétrit sous son impure haleine; La mort couvre de deuil et le mont et la plaine…. L’homme n’a plus d’asile, et Dieu n’a plus d’autel. Du fléau dévorant Job est atteint lui-même. Une lèpre hideuse enveloppe son corps; Le mal de son courage a brisé les ressorts; Contre le roi des rois il s’emporte et blasphême. Seul, en cris furieux exhalant ses douleurs, Il se traîne, il s’assied sur un fumier immonde, Et, tournant vers les cieux son oeil mouillé de pleurs, Il insulte, en ces mots, à l’arbitre du monde: » l’épouvante et la mort environnent mes pas; Pour jamais l’espérance à mon coeur est ravie: Impitoyable Dieu, que je ne connais pas, T’avais-je demandé le présent de la vie ? » Il achevait ces mots; un éclair pâlissant Vient luire, tout-à-coup, à sa vue alarmée; Il entend une voix; la voix du tout-puissant Tonne et sort en courroux de la nue enflammée. Qui blâme insolemment ma justice et ma loi ? D’où partent ces clameurs ? Quel mortel téméraire Du sein de son néant s’élève jusqu’à moi, Et de mes volontés veut sonder le mystère ? Toi qui me condamnais, ose m’envisager; Soutiens, si tu le peux, l’éclat qui m’environne; Prête l’oreille, Job, Dieu va t’interroger; Et, si tu me réponds, ma bonté te pardonne. Que faisais-tu le jour où naquit l’univers ? Est-ce toi qui, porté sur un trône d’éclairs, Des ombres du chaos où sommeillaient les mondes, Fis jaillir la lumière, et les vents et les ondes; Dont la main suspendit à la voûte des cieux Ces lustres d’or flottants, ces anneaux radieux; Toi qui dis à la mer: respecte tes limites; Aux astres de la nuit: roulez dans vos orbites; Au printemps: couvre-toi de fleurs et de festons; À l’été: fais éclore et mûrir les moissons; À l’automne: de fruits compose ta ceinture; À l’hiver: dors en paix sur un lit de froidure ? Es-tu maître des cieux ? à l’horizon vermeil, Au bord du firmament qu’un éclat pur colore, Sur un trône d’opale assieds-tu le soleil, Et dans son lit de pourpre éveilles-tu l’aurore ? Es-tu l’artisan des chaleurs ? Sur la terre fertilisée Fais-tu descendre les vapeurs Et les perles de la rosée ? Échappé tout-à-coup de l’antre des hivers, Ton souffle d’un voile de glace Enveloppe-t-il la surface Des ruisseaux vagabonds et des bruyantes mers ? Montes-tu sur les vents ? Peux-tu dans les nuages Cacher ton front majestueux ? Au seul bruit de ta voix le nord impétueux Ouvre-t-il, en grondant, l’arsenal des orages ? Devant les pâles matelots Fais-tu reculer la tempête ? Tes pieds marchent-ils sous les flots, Quand les flots grondent sur ta tête ? Ton oeil connaît-il les trésors Que la mer couvre de ses ombres ? Vivant, de l’empire des morts As-tu franchi les routes sombres ? Si l’homme, à mes pas attaché, A vu s’animer la matière, Et dans les champs de la lumière Resplendir le monde ébauché, Il doit savoir en quelles plaines L’obscurité tient son séjour, Et sur quelles rives lointaines Est assi le berceau du jour. Quelle main forge le tonnerre, Sur des ailes de feu balance les éclairs, Et sous les éléments, divisés par la guerre, Fait frémir et trembler les airs ? Au milieu d’une nuit profonde Qui hérissa les cheveux flamboyants De la comète vagabonde ? Qui déploya sa queue en replis ondoyants, De ton pouvoir fatale messagère, Ceinte d’épouvante et d’horreur, Va-t-elle aux nations parler de ta colère, Et sur le front des rois secouer la terreur, Mais peut-être c’est toi qui rafraîchis les plaines, Qui verses les torrents de la fertilité; En gerbes de cristal fais jaillir les fontaines, Tempères au midi les ardeurs de l’été; Toi qui, de mes secrets heureux dépositaire, Dans un désert aride, inconnu des humains, Sur le sommet d’un roc fécondé par tes mains, Offres à l’oeil du jour la rose solitaire ? Nomme celui dont le savoir Enseigne aux oiseaux leur langage; Dont le mystérieux pouvoir, Du paon étoile le plumage, Le nuance d’or et d’azur, Et sur sa tête triomphante Place une aigrette éblouissante Qui rayonne aux feux d’un jour pur. Lève-toi dans ta force, et commande aux étoiles D’illuminer le firmament. Homme insensé ! Fantôme d’un moment ! Dis à la sombre nuit de déployer ses voiles; Ou, contre l’univers justement irrité, Fais mugir les volcans, soulève les tempêtes, Tonne sur les pervers, et fais pencher leurs têtes Comme l’épi par les vents agité. Suis dans son vol l’aigle superbe: Elle ffront l’éclat d’un soleil radieux, Plane dans ses rayons, et, du sommet des cieux, Démêle un ver rampant sous l’herbe. Quand les nuages pluvieux Attristent le front de l’année, À l’hirondelle fortunée Permets-tu de changer de lieux ? Elle vole en d’autres contrées Où les zéphires caressants De leurs haleines tempérées Parfument les gazons naissants; La paix escorte ses voyages, Et dans mille climats nouveaux Pour elle croissent des feuillages, Et murmurent de clairs ruisseaux. Vois le cheval guerrier: le clairon du carnage Frappe-t-il l’air d’un bruit qui plaît à son courage, Le feu roule et jaillit de ses nazeaux fumants; L’écho lointain répond à ses hennissements: Vois son oeil réfléchir les éclairs de ta lance. Sous ta main qui le guide il frémit, il s’élance; Il court, les crins épars; la poudre des sillons Sous ses pieds belliqueux s’envole en tourbillons: Insensible au trépas qui partout le menace, Il perd des flots de sang sans perdre son audace; Il cède, il tombe enfin, mais sans se démentir; Et son soupir de mort est son premier soupir. As-tu réglé dans ta sagesse Quel nombre de jours et de mois La biche, malgré sa faiblesse, Du fardeau maternel peut supporter le poids ? Exempts des misères humaines, À peine leurs yeux sont ouverts, Ses petits vont bondir sous les ombrages verts, Ou se désaltérer dans les sources prochaines. Va sur les bords du Nil qu’entourent les roseaux; Suspends à la ligne mordante L’énorme crocodile habitant de ses eaux. Sur le sable, à tes pieds, vois sa rage expirante. Fuis plutôt si tu crains la mort…. Le héros devant lui sent fléchir son audace; Il n’ose réveiller le monstre qui s’endort, Et du fleuve sacré couvre au loin la surface: Mais s’il se dresse sur les flots, Quel guerrier de Memphis, nourri dans les batailles, Put jamais de son sang teindre ses javelots, Et porter en triomphe une de ses écailles ? Rempart impénétrable, il brave le trépas; Sur ses membres d’acier le fer vole en éclats, La flèche rejaillit… lorsque la foudre gronde Son oreille en aime le bruit: La tempête le réjouit, Et d’un cri d’allégresse il fait retentir l’onde. Dans l’univers cherche mon bienfaiteur: Qu’il se montre celui dont la main souveraine M’offre dans l’esclavage un appui protecteur, Et sans effort brise ma chaîne. Jette les yeux autour de toi; Les fleuves, les vallons, les ruisseaux, les prairies, Les bois épais, les collines fleuries, Tout m’appartient; le jour et la nuit sont à moi. Debout, au sein de la lumière, Je règne sur tous les climats; Et les astres sont la poussière Qu’avec dédain foulent mes pas, Je suis l’auteur de la nature; Le destin est ma volonté; L’espace me sert de ceinture, Et mon âge est l’éternité. Mortel, que je viens de confondre, Toi qui blasphêmais ma bonté, Maintenant ose me répondre ! » Dieu se tait, et les cieux frémissent à sa voix. Job reconnut sa faute, et des larmes amères S’échappant de ses yeux, attestent à la fois Sa honte et ses regrets sincères. « ô Dieu que j’offensais, pardonne à mon erreur; De mon coupable orgueil je vois trop la démence. Mais quand ta seule voix me glace de terreur, Fais jusqu’à mon néant descendre ta clémence. Dans le deuil et les pleurs, soumis à mon devoir, Je nourrirai sans cesse un remords salutaire; Est-ce au faible mortel à sonder ton pouvoir ? Il doit t’adorer et se taire. »
Après avoir exploré ‘JOB’, les lecteurs sont invités à réfléchir sur leur propre rapport à la foi et à la souffrance. N’hésitez pas à découvrir d’autres œuvres de Pierre Baour-Lormian ou à partager vos impressions sur ce poème poignant.