des sérénades et des autodafés !
Extrait d’une Revue littéraire
Et je n’entendrai plus les verrous se fermer sur l’éternel reclus.
Alfred de Vigny. – La Prison
Les moines tondus se promènent là-bas, silencieux et méditatifs, un rosaire à la main, et mesurent lentement de piliers en piliers, de tombes en tombes, le pavé du
cloître qu’habite un faible écho.
Toi, sont-ce là de tes loisirs, jeune reclus qui, seul dans ta cellule, t’amuses à tracer des figures diaboliques sur les pages blanches de ton livre d’oraisons, et à farder
d’une ocre impie les joues osseuses de cette tête de mort ?
Il n’a pas oublié, le jeune reclus, que sa mère est une gitana, que son père est un chef de voleurs; et il aimerait mieux entendre, au point du jour, la trompette sonner le
bouteselle pour monter à cheval, que la cloche tinter matines pour courir à l’église !
Il n’a pas oublié qu’il a dansé le boléro sous les rochers de la Sierra de Grenade avec une brune aux boucles d’oreille d’argent, aux castagnettes d’ivoire; et il aimerait mieux
faire l’amour dans le camp des bohémiens que prier Dieu dans le couvent !
Une échelle a été tressée en secret de la paille du grabat; deux barreaux ont été sciés sans bruit par la lime sourde; et du couvent à la Sierra de
Grenade, il y a moins loin que de l’enfer au paradis !
Aussitôt que la nuit aura clos tous les yeux, endormi tous les soupçons, le jeune reclus rallumera sa lampe, et s’échappera de sa cellule, à pas furtifs, un tromblon sous sa
robe.