Le Pont des Échos Retrouvés
Se dresse un pont, noble arc de pierre et de temps,
Où l’onde murmure et danse aux fruits du foyer,
En ce lieu suspendu, l’espoir vient s’abreuver.
Deux rives, séquestrées par l’étreinte du fleuve,
Gardent un secret vieux que la mémoire preuve.
Là, jadis jadis, deux âmes enlacées
S’étaient promises en douce contrée.
Lui, fils du matin, à l’âme voyageuse,
Elle, fleur des soirs, douce et silencieuse.
Leur union se tissait sous l’arbre des saisons,
Tissant le fil d’or aux accords du frisson.
Mais le temps, cruel orfèvre aux lames de sable,
Mordit leurs jours calmes d’un destin instable,
Séparant leur chant, éteignant leur flambeau,
Faisant de leur rêve un voyage en chaos.
Depuis, d’une rive à l’autre, dans l’orbe éloignée,
Leurs cœurs se cherchent, âmes esseulées,
Chaque aurore portée d’une brume légère,
Rappelle l’autre, désir clair comme verre.
Ils parlent, ils errent en l’ombre des branches,
Espérant que l’automne enfin les retranche,
Qu’au bout du chemin, dans l’air frémissant,
Une main trouve l’autre, un doux serrement.
— Où es-tu, aimée, souffle d’existence ?
— Ô toi, cher absent, mon frère de puissance —
Ils murmurent dans le vent, collines et vallées,
Leurs voix brisées entre ciel et ruisseaux mêlés.
Le pont, témoin muet de tant de passions,
Garde en ses fondations le poids des émotions,
Les pierres gravées comme un livre ouvert,
Veillent sur l’échange à la fois doux et amer.
Un jour vint, cependant, où l’un des deux brisa
Le silence long qui leur ôtait la voix.
Sur l’autre rive, elle, au bord du vertige,
Vit un reflet vivant, comme un doux prodige.
Les années figées fondirent soudain,
Le pont léger sous un souffle divin,
Deux âmes se mirent au diapason, au chant,
Tissant d’or la trame d’un nouveau printemps.
Ils avancèrent, pas mesurés et fiers,
Sur l’arche des jours, franchissant les barrières,
Leurs mains, enfin liées, dans la clarté d’azur,
Résistaient au temps, bravant le mur.
Le ruisseau chantait en un accord parfait,
Les feuilles applaudissaient ce serment secret,
Sous l’arche sacrée par l’espérance portée,
Deux âmes réunies dans la douceur sacrée.
Et là, sous le ciel au bleu indélébile,
L’amour renaissait, éternel, fragile.
La séparation, ombre désormais lointaine,
Devint simple reflet dans cette eau lointaine.
Par-delà le pont, le monde s’ouvrait vaste,
Promesse d’aventure où rien ne s’enfaste.
Ils avaient bravé le temps, l’absence et le doute,
Pour tisser une vie où la lumière écoute.
Ainsi l’homme et la femme, emportés par le souffle,
Ont trouvé sur le seuil ce que le cœur farouche
Gardait secret, précieux, doux comme un poème,
Unis dans le temps, réunis dans même.
Pont des âmes fidèles, au cœur du silence,
Tu gardes l’éclat d’une ultime délivrance,
Où sous un ciel clément, deux amants parvenus
Ont façonné l’espoir de jours jamais perdus.