Le Chant des Rivages Éternels
Dans l’ombre vaste où le ciel étreint son manteau gris,
Se tend un rivage aux soupirs infinis,
Où le souffle du vent murmure en rifflant.
Là, Marin, l’âme errante au regard méditant,
S’en vient chaque jour, sur cette étendue délie,
Écouter les vagues, géantes mélodies,
Les voix mille fois nées sous l’arche du firmament.
Il sait que la mer porte en son sein profond
Les secrets d’antiques navires engloutis,
Les pleurs salés des marins, cris évanouis,
Et l’écho jaune d’un soleil d’horizon.
— Ô mer, dit-il, contes-tu des chimères
Que la brume cache aux cœurs trop désarmés ?
Que cache ton chant, que cache ton fumet,
Sous l’écaille bleue de tes nuits amères ?
Les vagues, d’un souffle lourd et mélancolique,
Bercèrent son esprit comme un vieux berceau,
Racontant des histoires qui viennent de loin, de l’eau,
Qui dansent au vent inégal, caressent la musique.
Chaque flamme d’écume est un vers, une mémoire,
Chaque éclat d’algue un verset d’azur,
Et sous la dent des roches, le murmure, sûr,
De l’éternel retour, de la nature illusoire.
Marin, recueillant cet hymne à la vie,
Offre son âme aux flots, aux récits oubliés,
Il entend dans le fracas, sur les kristaux nacrés,
Les lamentations des vents, la clameur infinie.
Il se souvient, enfant, d’un très vieux conteur,
Qui de sa voix rauque et d’un souffle marin,
Lui disait que la mer est la plus grande mémoire,
Gardienne du temps, des âges, et des heures.
— Entends-tu les pleurs des étoiles noyées ?
Dit Marin à la mer, qui doucement s’incline.
— Je les écoute, dit-elle, et chaque crêpe fine
Est un souffle de vie, un souffle apaisé.
Les nuits sont des peintures où s’étalent des présages,
L’horizon se brise en lambeaux d’or couchant,
La mer fait son possible, infiniment mouvant,
Pour délivrer ses récits, ses âmes, ses visages.
Marin recueille et note, de la plume fidèle,
Les plaintes des vents froids, la caresse lunaire,
Dans ses yeux, la mer, immense étagère,
Est un livre ouvert, une source éternelle.
Mais parfois le silence se fait aussi profond,
Quand la mer se retire et cache ses mystères,
Qu’elle brûle de lumière, en ses lointains sphères,
Et que seuls restent les pas, légers sur les fonds.
Alors, il médite sur la fuite du temps,
Sur cette vie éphémère et ses empreintes d’écume,
Sur le destin humain aux fins qu’on s’allume,
Sous le balancement mélodieux des éléments.
— Que suis-je, s’interroge-t-il, sinon un souffle,
Une vague fragile parmi tant d’autres vagues ?
Un témoin des eaux, des récits en bagages,
Pèlerin d’un océan aux cycles farouches.
Dans ces nuits sans âge, lorsque la mer se tait,
Le cœur du rivage pulse sous lui, vulnérable,
Marin sent que la mer est une voix implacable,
Qui jamais ne meurt, car jamais ne s’éteint.
Le jour se lève en bleu, en reflets scintillants,
Les algues s’agitent sous les caresses du vent,
La mer chante encore, éternel firmament,
Et Marin, souriant, se perd dans le chant.
Il sait qu’aucune fin ne peut clore l’histoire,
Que la mer emportera ses vers et ses embûches,
Que demain, d’autres yeux, d’autres mains farouches,
Écouteront en lui le berceau de la mémoire.
Ainsi s’ouvre la vie à l’infini des plages,
Aux mystères profonds des océans d’argile,
Où flottent les rêves dans la lumière fragile,
Et le chant des vagues éclaire les visages.
Marin s’en retourne, le cœur rempli de vents,
Réveillant le rivage endormi sous ses pas,
Écouter les vagues, ce poème en éclats,
C’est accueillir la mer comme un hymne vivant.
Et sur ce rivage battu par l’éternel océan,
Où les histoires pleuvent telle une pluie d’argent,
Marin attend, prêt à cueillir un nouvel instant,
La mer comme toujours, déploie son mouvement…