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Les Amours
Jean de Sponde, poète du 16ᵉ siècle, explore dans ‘Les Amours’ les tumultes de l’amour sous le prisme de la souffrance personnelle. À travers ce poème, il invite le lecteur à s’interroger sur la nature de l’amour, sa beauté et sa douleur, tout en capturant l’intensité émotionnelle des sentiments humains. Cette œuvre demeure pertinente aujourd’hui pour ceux qui ont connu les affres de l’amour.
I Si c’est dessus les eaux que la terre est pressÃĐe, Comment se soutient-elle encor si fermement? Et si c’est sur les vents qu’elle a son fondement, Qui la peut conserver sans Être renversÃĐe? Ces justes contrepoids qui nous l’ont balancÃĐe Ne penchent-ils jamais d’un divers branlement? Et qui nous fait solide ainsi cet ÃĐlÃĐment Qui trouve autour de lui l’inconstance amassÃĐe ? Il est ainsi : ce corps se va tout soulevant Sans jamais s’ÃĐbranler parmi l’onde et le vent, Miracle non pareil! si mon amour extrÊme, Voyant ces maux coulants, soufflant de tous cÃītÃĐs, Ne trouvait tous les jours par exemple de mÊme Sa constance au milieu de ces lÃĐgÃĻretÃĐs. Je meurs, et les soucis qui sortent du martyre Que me donne l’absence, et les jours, et les nuits, Font tant qu’à tous moments je ne sais que je suis, Si j’empire du tout ou bien si je respire; Un chagrin survenant mille chagrins m’attire Et me cuidant* aider moi-mÊme je me nuis, L’infini mouvement de mes roulants ennuis M’emporte, et je le sens, mais je ne puis le dire. Je suis cet AÃĐtÃĐon de ses chiens dÃĐchirÃĐ! Et l’ÃĐclat de mon ÃĒme est si bien altÃĐrÃĐ Qu’elle qui me devrait faire vivre me tue : Deux dÃĐesses nous ont tramÃĐ tout notre sort, Mais pour divers sujets nous trouvons mÊme mort, Moi de ne la voir point, et lui de l’avoir vue. VI Mon Dieu, que je voudrais que ma main fÃŧt oisive, Que ma bouche et mes yeux reprissent leur devoir! Ãcrire est peu : c’est plus de parler et de voir, De ces deux Åuvres l’une est morte et l’autre vive. Quelque beau trait d’amour que notre main ÃĐcrive, Ce sont tÃĐmoins muets qui n’ont pas le pouvoir Ni le semblable poids, que l’Åil pourrait avoir Et de nos vives voix la vertu plus naÃŊve. Mais quoi! n’ÃĐtaient encor ces faibles ÃĐtançons Et ces fruits mi-rongÃĐs dont nous le nourrissons, L’Amour mourrait de faim et cherrait en ruine : Ãcrivons, attendant de plus fermes plaisirs, Et si le temps domine encor sur nos dÃĐsirs, Faisons que sur le temps la constance domine. VII Si j’avais comme vous, mignardes colombelles, Des plumages si beaux sur mon corps attachÃĐs, On aurait beau tenir mes esprits empÊchÃĐsl De l’indomptable fer de cent chaÃŪnes nouvelles, Sur les ailes du vent je guiderais mes ailes, J’irais jusqu’au sÃĐjour oÃđ mes biens sont cachÃĐs, Ainsi, voyant de moi ces ennuis arrachÃĐs, Je ne sentirais plus ces absences cruelles. Colombelles, hÃĐlas ! que j’ai bien souhaitÃĐ Que mon corps vous semblÃĒt autant d’agilitÃĐ, Que mon ÃĒme d’amour à votre ÃĒme ressemble : Mais quoi! je le souhaite, et me trompe d’autant. Ferais-je bien voler un amour si constant D’un monde tout rempli de vos ailes ensemble ? XV Cette brave Carthage, un des honneurs du monde Et la longue terreur de l’Empire romain, Qui donna tant de peine à son cÅur, à sa main, Pour se faire premiÃĻre, et Rome la seconde, AprÃĻs avoir domptÃĐ presque la terre et l’onde, Et portÃĐ dans le ciel tout l’orgueil de son sein, Ãprouva mais trop tard qu’un superbe dessein FondÃĐ dessus le vent il faut enfin qu’il fonde. Cette insolente-là , la pompe qu’elle aima, Le brasier dÃĐvorant du feu la consuma : Que je me ris au lieu, Carthage, de te plaindre! Ton feu dura vingt jours, et brÃŧla pour si peu. HÃĐlas ! que dirais-tu si tu voyais qu’un feu Me brÃŧle si longtemps sans qu’il se puisse ÃĐteindre ? XVII Je sens dedans mon ÃĒme une guerre civile, D’un parti ma raison, mes sens d’autre parti, Dont le brÃŧlant discord ne peut Être amorti Tant chacun son tranchant l’un contre l’autre affile. Mais mes sens sont armÃĐs d’un verre si fragile Que si le cÅur bientÃīt ne s’en est dÃĐparti Tout l’heur vers ma raison se verra converti, Comme au parti plus fort, plus juste et plus utile. Mes sens veulent ployer sous ce pesant fardeau Des ardeurs que me donne un ÃĐloignÃĐ flambeau, Au rebours la raison me renforce au martyre. Faisons comme dans Rome, à ce peuple mutin De mes sens inconstants arrachons-les enfin, Et que notre raison y plante son Empire. XIX Je contemplais un jour le dormant de ce fleuve Qui traÃŪne lentement les ondes dans la mer, Sans que les Aquilons le fassent ÃĐcumer Ni bondir, ravageur, sur les bords qu’il abreuve. Et contemplant le cours de ces maux que j’ÃĐpreuve Ce fleuve, dis-je alors, ne sait que c’est d’aimer; Si quelque flamme eÃŧt pu ses glaces allumer, Il trouverait l’amour ainsi que je le treuvea. S’il le sentait si bien, il aurait plus de flots, L’Amour est de la peine et non point du repos, Mais cette peine enfin est du repos suivie, Si son esprit constant la dÃĐfend du trÃĐpas; Mais qui ‘ meurt en la peine il ne mÃĐrite pas Que le repos jamais lui redonne la vie.
En méditant sur ‘Les Amours’, le lecteur est invité à réfléchir sur ses propres expériences d’amour et de perte. Explorez davantage d’œuvres de Jean de Sponde pour découvrir comment ses mots continuent de résonner dans le voyage émotionnel de chacun d’entre nous.