Où votre humanité goûte une brève mort.
Pour un embrassement libre de toute crainte.
J’ai fait de toi cet
Arbre, et je suis sans remords !
J’ai feint d’être jalouse,
Atys, et je me flatte
D’avoir d’un faux-semblant joué les dieux du ciel.
Pour que, grand arbre humain, chaud de sève écarlate,
La résine à ton flanc coule comme le miel.
Un jeune pin tendu vers l’essence divine
Fait des signes au ciel avec ses longues mains.
Sa cime cherche un dieu, mais ses lentes racines
Dans mon corps ténébreux creusent de lents chemins.
Livre en vain tes cheveux à tous les vents du monde !
Tends tes branches au dieu que tu voudrais saisir !
Rien, rien n’arrachera ta racine profonde
A mon immense corps engourdi de plaisir.
Plus tu t’érigeras vers l’azur dont l’abîme
Recèle un pur amour inconnu de nos dieux.
Plus tes membres profonds jouiront de leur crime
Dans la nuit de mon corps que j’ai fermé sur eux.
Mais, brève éternité dont
Cybèle s’enchante,
Toute étreinte a fini quand les dieux l’ont voulu.
Homme, arbre, sève ou sang ou résine gluante.
Un jour, fleuve brûlant, tu ne couleras plus.
Jusqu’à la fin des temps, il faudra que je porte
Alys debout, rongé d’essaims et de fourmis.
Tes racines seront la chevelure morte.
Les serpents sur mon cœur à jamais endormis.
Reptiles embaumés que rien ne putréfie.
Au cadavre d’Atys ils emmêlent mon sort :
Je tends cet arbre mort aux dieux que je défie.
Je me ramasse toute autour d’un arbre mort.
Mes vignes, mes forêts et mes sillons avides
Jaillissent en rayons de ce corps calciné.
Les astres, dans leur nuit cherchant ce gibet vide.
Comme un troupeau de dieux ont vers lui cheminé.
Et seule, je ne sais, noire colonne , ô pâtre.
Doux arbre humain qui fus de feuilles frémissant.
Sur ton cadavre nu, quel aigle va s’abattre,
S’agriffer à l’écorce et te couvrir de sang…