À l’époque où les rois Ouranides sont nés,
Ekhidna, moitié nymphe aux yeux illuminés,
Moitié reptile énorme écaillé sous le ventre.
Khrysaor engendra ce monstre horrible et beau,
Mère de Kerbéros aux cinquante mâchoires,
Qui, toujours plein de faim, le long des ondes noires.
Hurle contre les morts qui n’ont point de tombeau.
Et la vieille Gaia, cette source des choses,
Aux gorges d’Arimos lui fit un vaste abri,
Une caverne sombre avec un seuil fleuri ;
Et c’est là qu’habitait la Nymphe aux lèvres roses.
Tant que la flamme auguste enveloppait les bois,
Les sommets, les vallons, les villes bien peuplées,
Et les fleuves divins et les ondes salées,
Elle ne quittait point l’antre aux âpres parois
Mais dès qu’Hermès volait les flamboyantes vaches
Du fils d’Hypérion baigné des flots profonds,
Ekhidna, sur le seuil ouvert au flanc des monts,
S’avançait, dérobant sa croupe aux mille taches.
De l’épaule de marbre au sein nu, ferme et blanc,
Tiède et souple abondait sa chevelure brune ;
Et son visage clair luisait comme la lune,
Et ses lèvres vibraient d’un rire étincelant.
Elle chantait : la nuit s’emplissait d’harmonies ;
Les grands lions errants rugissaient de plaisir;