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La Colombe
Dans ‘La Colombe’, Louis Bouilhet capture l’essence de l’angoisse et de la mélancolie humaine à travers une métaphore puissante des dieux déchus. Écrit à une époque où la foi était en déclin et les croyances traditionnelles remises en question, ce poème interroge notre relation avec le divin et notre place dans un monde en mutation. La profondeur des émotions évoquées par Bouilhet résonne encore aujourd’hui, rendant ce poème d’une pertinence éternelle.
Quand chassés, sans retour, des temples vénérables, Tordus au vent de feu qui soufflait du Thabor, Les grands Olympiens étaient si misérables Que les petits enfants tiraient leur barbe d’or ; Durant ces jours d’angoisse oĂš la terre étonnée Portait, comme un fardeau, l’écroulement des cieux, Un seul homme, debout contre la destinée, Osa, dans leur détresse, avoir pitié des dieux. C’était un large front, â un Empereur, â un sage, Assez haut sur son trône et sur sa volonté Pour arrĂŞter du doigt tout un siècle au passage, Et donner son mot d’ordre Ă la Divinité. Or, un soir qu’il marchait avec ses capitaines, Incliné sous ce poids de l’avenir humain, Il aperçut, au fond des brumes incertaines, Un vieux temple isolé, sur le bord d’un chemin ; Un vieux temple isolé, plein de mornes visages, Un de ces noirs débris, au souvenir amer, Qui dorment échoués sur la grève des âges, Quand les religions baissent comme la mer. Le seuil croulait ; la pluie avait rongé la porte Toute la lune entrait par les toits crevassés. Au milieu de la route, il quitta son escorte, Et s’avança, pensif, au long des murs glacés. Les colonnes de marbre, Ă ses pieds, abattues, Jonchaient de toutes parts les pavés précieux ; L’herbe haute montait au ventre des statues, Des cigognes rĂŞvaient sur l’épaule des dieux. Parfois, dans le silence, éclatait un bruit d’aile ; On entendait, au loin, comme un frisson courir ; Et, sur les grands vaincus penchant son front fidèle, PhĹbé, froide comme eux, les regardait mourir. Et, comme il restait lĂ , perdu dans ses pensées, Des profondeurs du temple il vit se détacher, Avec un bruit confus de plaintes cadencées, Une lueur tremblante et qui semblait marcher. Cela se rapprochait et sonnait sur les dalles. C’était un grand vieillard qui pleurait en chemin, Courbé, maigre, en haillons, et traĂŽnant ses sandales, Une tiare au front, une lampe Ă la main. Il cachait sous sa robe une blanche colombe ; Dernier prĂŞtre des dieux, il apportait encor Sur le dernier autel la dernière hécatombe⌠Et l’Empereur pleura, â car son rĂŞve était mort ! Il pleura, jusqu’au jour, sous cette voĂťte noire. Tu souriais, ô Christ, dans ton paradis bleu, Tes chérubins chantaient sur des harpes d’ivoire, Tes anges secouaient leurs six ailes de feu ! Et du morne Empyrée insultant la détresse, Comme au bord d’un grand lac aux flots étincelants. Dans le lait lumineux perdu par la Déesse, Tes martyrs couronnés lavaient leurs pieds sanglants. Ta régnais, sans partage, au ciel et sur la terre ; Ta croix couvrait le monde et montait au milieu ; Tout, devant ton regard, tremblait, â jusqu’Ă ta mère. Pâle éternellement d’avoir porté son Dieu. Mais tu ne savais pas le mot des destinées, O toi qui triomphais près de l’Olympe mort ; Vois : c’est le mĂŞme gouffre… Avant deux mille années Ton ciel y descendra, â sans le combler encor ! Ta connaĂŽtras aussi, ployé sous l’anathème, La désaffection des peuples et des rois, Si pauvre et si perdu que tu n’auras plus mĂŞme, Pour t’y coucher en paix, la largeur de ta croix ! Ton dernier temple, ô Christ, est froid comme une tombe ; Ta porte n’ouvre plus sur le vaste Avenir ; VoilĂ que le jour baisse et qu’on entend venir Le vieux prĂŞtre courbé, qui porte une colombe !
En contemplant la détresse des personnages de Bouilhet et la symbolique de la colombe, les lecteurs sont invités à réfléchir sur leur propre quête de sens et la fragilité des croyances. N’hésitez pas à explorer plus d’œuvres de cet auteur et à partager vos réflexions sur ce poème touchant.