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Labyrinthes de Sagesse
Le poème ‘Labyrinthes de Sagesse’ de Jean de Bosschère s’inscrit dans une tradition poétique où la douleur et l’incompréhension sont mises en avant. À travers un langage riche et évocateur, Bosschère nous plonge dans les méandres de l’esprit humain confronté aux absurdités du monde moderne. Ce poème, écrit au 20ᵉ siècle, résonne encore aujourd’hui par sa pertinence émotionnelle et son analyse critique de la société.
Tu ris parce que je suis ivre hier tu riais ainsi, aujourd’hui, parce que j’émerge mal de la substance éternelle. Tu hais le poète qui joue du tambour avec le bout sourd de ses doigts ; c’est son métier vieux et caduc comme Dieu. Puis, incompréhensiblement vide de logique, tu méprises mon refus des politiques, mes mornes blasphèmes aux écoliers vermiformes, mes serments contre les mesures neigeuses, les mères pleines d’œufs fécondés, les férules poinçonnées aux Facultés. Louanges sur moi, fleuve d’insignes laudatives ; mieux que remonter la roche Sisyphe, j’ai donné des coups de barre pour revenir ici, habiter avec eux, agiter des causes avec vous. Quatre murailles de crétinisme me séparent des mondes, ceux que mesurent les systèmes des philosophes. Et enfin bref, il est connu que j’ignore les mères et tous les prurits. Et bref, l’on sait qu’il me manque vingt pour cent de l’intelligence d’un général. Dans mon ciel primitif où tout est angoisse, une telle lumière brille qu’elle n’est qu’un cristal sans formes, torrent sans géographie, éruption d’océans d’eaux où je ne suis pas coupable de ne plus comprendre les ordres ni les paroles, ni les gestes, ni les désirs. Je vis gratuitement dans un paradis noir sans signaux, sans murmures, entouré des dites murailles d’acier cataractes éternelles dans l’éclatement du tonnerre, ange véritable sans ciel, canaille illuminée, chaste, brisé, idiot célestement pur, étranger. Vous, ô vous labyrinthes de sagesse, qui savez les pernicieuses mathématiques, donnez les lois perfides et les règles insanes, possédez les mots et les signes qui expliquent. Dites, ô vous, opiniâtres imbéciles, dites-moi pourquoi cette jeune fille, droite comme une épine, — elle a il me semble l’âge des écueils — qui me déteste comme un poète crédule, dans un soir grotesque où je mis la main désolée sur son épaule, hurla un cri équivoque me serrant dans ses membres brûlants ; pourquoi je suivis cette femme décharnée jeune laide consternée, — un ruban de velours attachait son cou pâle à ses épaules d’os bleu, — et la haïssant pour le mode dont naissaient ses cheveux, je lui fis don avec art d’un mauve bengali au beau quai de la Mégisserie ; pourquoi, persévérant, j’ai caressé la tête blonde d’un enfant visqueux qui vomissait du Rostand ; pourquoi, rien sinon mon couteau fut tenté en contemplant l’exil de peau verte d’ombre entre la chemise de nacre et le bas comme une dorade de cette gigantesquement pauvre élégante ; pourquoi, depuis vingt ans épave, Notre-Dame de Paris est un étau qui me serre le cœur dans le temps, me broie de douleur insondable ; pourquoi ma pipe laconique qui s’éteint me jette dans le désespoir de la mort ; pourquoi le piano Citroen sur la tour Eiffel me pousse avec les mains du suicide vers le fleuve ; pourquoi la douleur siphon rigoureux me vide comme un Pétrouchka mais qui ne ressuscitera plus. Vous, sages qui connaisse/ les phénomènes ?
Au cœur des réflexions de Bosschère, ce poème pousse à questionner notre propre rapport à la réalité et à la sagesse. N’hésitez pas à explorer davantage ses œuvres pour une plongée dans la profondeur de l’âme humaine.