Le Serment Évanoui dans les Brumes de l’Aube
**I. Le Départ**
Sur les falaises où le vent pleure ses litanies,
Un marin déchira l’aube aux lèvres salines,
Ses yeux brûlaient du feu sombre des cartes anciennes,
Cherchant un port perdu où dorment les sirènes.
« Je reviendrai », jura-t-il à sa sœur au cœur fragile,
Dont les mains, fleurs tremblantes, agrippaient son exil.
Le village, spectre gris accroché au granit,
Vit s’éloigner son fils vers l’horizon maudit.
**II. La Tempête**
L’océan, dieu vorace, déroula ses colères,
Les mâts, comme des croix, ployèrent sous les éclairs.
Trois lunes, trois soleils, le navire fantôme
Dansa avec la mort en un sinistre royaume.
« Ô vérité ! » criait l’homme aux abîmes liquides,
Mais les vagues riaient, couronnées de phosphores,
Emportant dans leur jeu les fragments de l’espoir,
Et l’équipage entier, noyé dans son devoir.
**III. L’Échouage**
Un matin sans oiseaux, le destin échoua
L’épave sur un rivage que nul n’arpenta.
Des maisons en ruine, squelettes de chaux vive,
Murmuraient des secrets que le temps captive.
Le marin, pieds sanglants, marcha vers ce mirage,
Guidé par une voix plus douce qu’un herbier,
Une femme apparut, ombre aux cheveux d’algues noires,
Souriant un défi à l’ombre des mémoire.
**IV. Le Pacte**
« Tu cherches ce qui brûle au-delà des apparences ?
Perce le voile épais où dorment les souffrances,
Mais chaque vérité porte un prix de douleur »,
Dit-elle en tendant une coupe de sueur et de pleurs.
Il but, aveuglément, croyant dompter les rêves,
Et promit à la brume un serment sans retour :
« Je dévoilerai l’âme cachée de ce monde,
Dussé-je en consumer mes veines et mon sang ! »
**V. Les Illusions**
Le village respirait, chair vive sous la brume,
Chaque pierre chantait une enfance défunte.
L’homme crut reconnaître, au détour d’un décombres,
Le rire de sa sœur dans les roses de l’automne.
Mais les murs s’effaçaient dès que tombait la lune,
Laissant place à un bois de statues sans visage,
Gardiennes éternelles d’un amour interdit,
Où chaque pas creusait un peu plus son interdît.
**VI. L’Éveil**
Sous un figuier stérile, il trouva des parchemins
Où des mains oubliées avaient peint son destin :
Un navire englouti, un cœur percé d’algues vertes,
Et ces mots : « Nul ne fuit ce que les cieux ont offert. »
La vérité, vipère, le mordit jusqu’à l’âme :
Le village n’était qu’un reflet de lui-même,
Prisonnier des remords qui rongeaient ses nuits blanches,
Miroir brisé tendu par les vagues méchantes.
**VII. La Chute**
Il courut vers la grève, appelant le néant,
Mais la mer, calmée, lui renvoya son sanglant
Reflet : un vieillard creusé par les années vaines,
Portant les stigmates de ses propres haleines.
« J’ai menti », sanglota-t-il vers les cendres du port,
Alors que le village fondait comme un mirage,
Emportant dans son sein la femme aux cheveux d’algues,
Et l’espoir enterré sous le linceul des vagues.
**VIII. L’Épilogue**
Cent ans ont érodé les rochers de la côte,
Quelques pêcheurs parfois racontent à mi-voix
L’histoire d’un fantôme errant les nuits d’orage,
Cherchant en vain les mots qui brisent les naufrages.
Sa sœur, sous une pierre où s’accroche le thym,
Dort d’un sommeil peuplé de murmures marins,
Tandis que dans les flots, entre chien et loup,
Rôde une ombre qui pleure un serment de fou.
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