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Les Transtéverins ou les Sans-Culottes du Tibre

Les Transtéverins de Théodore Désorgues est un magnifique poème qui explore les thèmes de la liberté, de l’héritage et de la résistance face à l’oppression. Écrit au 19e siècle, ce poème met en lumière la fierté du peuple Transtéverin, un groupe de Romains qui ont su préserver leur indépendance malgré l’autorité imposée par les puissants. En célébrant la grandeur de Rome et ses ruines historiques, Désorgues invite le lecteur à réfléchir sur l’importance de l’identité culturelle et de la mémoire collective.
Rome fêtait Simon : un peuple fanatique Inondait à grands flots sa vaste basilique ; L’étranger dans ses murs volait de tous côtés Pour voir l’ordre pompeux de ses solennités : Et moi, loin de la foule, errant sur ses collines, J’allai dans le silence admirer ses ruines. Viens, me dit mon ami, viens : jamais ces remparts D’un si riche appareil n’ont frappé des regards. L’airain sacré t’appelle à cette auguste fête ; De ce dôme éclatant vois-tu parer le faîte ? Il doit ce soir, orné de mille feux divers. Tel qu’un globe enflammé s’élever dans les airs; Courons au Vatican : le pontife lui-même Y marche le front ceint du triple diadème, D’un cortège nombreux il prie environné, Et bénit à l’autel le Romain prosterné. Ah ! lui dis-je, plutôt dédaignons ces prestiges, Cherchons une autre Rome et de plus grands prodiges. Qu’au temple de l’apôtre un pontife orgueilleux De son coupable encens déshonore les cieux, Irais-je, me mêlant à la foule insensée, De superstitions attrister ma pensée ? Quand je puis sur ces monts, parmi ces monuments, Régénérer mon cœur par de grands sentiments ! A ces mots, je m’éloigne, et mes regards avides Recueillant, en passant, des souvenirs rapides. Là, disais-je, les rois, proscrits, chargés de fers, Venaient au Capitole étaler leurs revers ; Ici, des nations réglant les destinées, Rome voyait passer les villes enchaînées. Tout parlait à mon cœur, tout m’offrait un grand nom : Chaque pierre à mes yeux dictait une leçon. Ah ! m’écriais-je, ému par tant d’objets célèbres, Si parmi ces tombeaux, ces monuments funèbres, Sous ces arcs triomphaux s’offrait à mes regards, Quelque auguste débris des descendants de Mars, Qu’avec transport j’irais, reconnaissant le Tibre, Presser ces vieux Romains, reste d’un peuple libre ! De mes bras étendus je suppliais les cieux De ne point rejeter le plus doux de mes vœux ; Soudain je vois ce pont où l’invincible Horace À Porsenna vainqueur opposa son audace. J’aperçois l’Aventin, où le peuple autrefois Contre l’oppression vint réclamer ses droits ; Où de Valerius la paisible éloquence De Rome et du sénat resserra l’alliance. Ce mont, en tous les temps, cher à la liberté. D’un peuple indépendant est encor fréquenté. Là, Rome de ses fils a rassemblé l’élite ; Là, des Transtéverins ‘ repose la limite. Tel qu’un vieil obélisque, épargné par les ans, Qui voit autour de lui rouler l’ordre des temps, Au milieu des débris de la grandeur romaine Ce peuple élève encor sa tête souveraine, Séparés par leurs murs de ces tyrans cloîtrés, De ce troupeau rampant de Vandales mitres, Sous les grossiers lambeaux de l’obscure indigence Ils ont su conserver leur mâle indépendance. Avec Rome elle-même ils n’ont pu s’abaisser, Tant un grand caractère est lent à s’effacer ! Ah ! ne jugez pas d’eux par cette foule impure D’ambitieux dévots, enrichis d’imposture, Qui, dans le Vatican, aux intrigues nourris, Obtiennent un chapeau pour vingt ans de mépris ! Par ces lâches flatteurs dont la bouche vendue Du pontife, à grands cris, annonce la venue. Et par ces vils brigands, ces pieux meurtriers Qui du parvis de Pierre assiègent les piliers. Et du crime impuni montrant l’affreux exemple, Lavent leurs bras sanglants sur les degrés du temple. Ah ! les Transtéverins, plus fiers, plus généreux, N’abaissent point ainsi l’honneur de leurs aïeux : Ils ignorent l’intrigue; et d’une main avare Ils n’ont jamais flatté l’orgueil de la tiare. Quand sur eux, en marchant, le pape étend les bras, Bénis, lui disent-ils, passe et ne reviens pas. Ils blâment hautement son lâche despotisme, Son faste, ses projets, son fatal népotisme ; Et ce peuple, à sa mort, sans plaisir, sans chagrin, Du Capitole en deuil entend gémir l’airain. Eh ! Pourquoi voulez-vous que leur rudesse austère De leurs aïeux n’ait point gardé le caractère! Le sacré despotisme, en corrompant leurs lois, A sans doute altéré la chartre de leurs droits ; Mais leur sang pur toujours transmis par des Romaines, Avec leur noble orgueil a coulé dans leurs veines ; Et souvent l’étranger, en contemplant leurs traits, Des demi-dieux du Tibre a cru voir les portraits. Leurs noms, riche héritage, annoncent leur naissance : Quand d’utiles travaux exercent leur constance, Accourez sur ces monts, vous entendrez Brutus, Vous y verrez bêcher le vieux Cincinnatus. La main d’Agricola sème ce champ fertile, Ces bœufs sont à Gracchus, ce char est à Camille. Qui d’un bois arrondi frappe ce but roulant? L’écho fidèle au loin redit Coriolan. Dans le sein de l’Eglise, au milieu des mystères, Ils conservent les mœurs, les fêtes de leurs pères. Ils appellent encore à leurs banquets joyeux Enée et les Troyens, pères de leurs aïeux ; De fleurs, couchés sur l’herbe, ils couronnent leur coupe, Et pour d’illustres jeux ils rassemblent leur troupe ; L’un déploie en luttant la vigueur de son corps. De ses muscles tendus fait mouvoir les ressorts, Et sous des coups nouveaux prend des forces nouvelles. Que de souples Darès ! que de nerveux Entelles ! L’autre exerçant ses pieds à d’agiles combats. Vers le but éloigné précipite ses pas. Nisus à son rival rend sa chute fatale, Et se relève encor pour son cher Euryale. Celui-ci dans les airs fait bondir un ballon ; Marius le reçoit, et le rend à Caton ; Celui-là courbe un arc, joint l’adresse à la force. Et d’un ormeau qui tremble il traverse l’écorce. Ainsi, les fiers Toscans, les antiques Sabins Aux durs travaux de Mars préparèrent leurs mains ; Ainsi, Rome autrefois en héros si féconde Préluda par ces jeux à l’empire du monde. Là revivent encor ses usages, ses dieux, La source d’énergie obtient toujours des vœux : Ils n’ont point oublié les déités champêtres; Ils offrent à Paies les dons de leurs ancêtres : Mais de Bacchus surtout ils attestent le nom, Et d’un culte annuel honorent sa boisson. À peine au carnaval reviennent ses orgies Que d’un nectar nouveau ses ménades rougies Volent, le thyrse en main, sur des chars enflammés, Et promènent trois jours ses jeux accoutumés : Le peuple alors reprend l’autorité suprême. Abaisse devant lui le triple diadème, Le barigel lui-même exécute ses lois, Et le front découvert il proclame ses droits.
Ce poème offre une perspective poignante sur la lutte pour la liberté et les valeurs qui définissent notre humanité. Partagez vos réflexions sur ‘Les Transtéverins’ et n’hésitez pas à explorer d’autres œuvres de Théodore Désorgues pour enrichir votre expérience poétique.

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