A poussé, devant nous, le vantail d’or
Du vieil
Automne auguste aux yeux de solitude ;
L’herbe est joyeuse encore
Et, dès le seuil,
Le regain vêt le pré de sa verdure neuve ;
Regarde : la vallée s’élargit comme un fleuve ;
L’arrière-été, frileux sous son manteau de feuilles,
Se lève, au loin, souriant la bienvenue,
Et chante, comme au temps des cueilles
Et les oiseaux,
Alors qu’il cherchait l’ombre et riait nu
D’entre les grands lys d’eau et les roseaux…
L’été n’eut pas de gloire comme celle-ci :
Le verdoyant orgueil de son laurier
N’a pas valu les diadèmes d’or verdi
Que te voici cueillant au peuplier léger ;
Et si des feuilles saignent sous nos pas
Comme une lie vive de vendange,
L’âme subtile et fauve de l’effeuillaison
Monte sous bois, en griserie étrange
Entre les ormes tors.
Quand nous passons, riant tous deux, couronnés d’or
Et tout autour de nous est beau comme la mort.
Seules les feuilles bruissent,
Au sillage de ta jupe hâtive ;
Arrête ! écoute et retiens ton haleine :
Il n’est plus un murmure qui vive,
Le silence des rayons oblique et glisse
Furtif entre les chênes…
La brise meurt ;
L’air est si calme qu’on entend son cœur
Qui bat la vieille peine…
La
Mort est belle comme ce soir, je crois
—
Silencieuse et pâle, sans rêve et sans émoi —
Nulle douleur voilée ne guette entre les ifs
Ceux dont la voix s’éteint comme un chant qui s’éloigne
Et le geste crédule où les lèvres se joignent
Scelle d’un sceau d’enfant la loi grave du sort ;
Saluons d’un baiser l’Automne aux yeux pensifs ;
La
Vie est un sourire aux lèvres de la
Mort…
Si de la gaîté claire de tes guirlandes
J’ai fait comme un refrain au rêve de la vie,
La sente du verger ou le sentier des landes
Ondule au rythme égal de ma mélancolie ;
On pleurerait, peut-être, à rêver l’ombre grande
Et le cri du tombeau où nul ne vient à l’aide ;
Mais l’ombre grêle est douce sous la charmille tiède,
Le râteau à tes pieds mord des feuilles crispées ;
L’été hésite, avec ses heures attroupées,
Au seuil de l’occident et sourit à la nuit…
…Que ferons-nous demain de ces roses coupées ?
J’ai hâte du feu clair et de ta voix qui lit…