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Sacrifice sous une ville en ruines

Plongez dans un univers où les ruines d’une ville deviennent le théâtre d’une rencontre bouleversante. Ce poème explore le thème du sacrifice, où un vieil homme et une enfant mystérieuse tissent un dialogue poignant entre le passé et l’avenir. À travers des images puissantes et des émotions profondes, découvrez comment la douleur et la perte peuvent donner naissance à une lueur d’espoir.

Le Dernier Soupir des Pierres

Au cœur d’un soir plombé, sous un ciel de suie épaisse,
Un vieillard aux cheveux d’argent, ombre qui s’affaisse,
Errait parmi les murs éventrés, spectres gris,
Où jadis s’élevait l’orgueil d’un grand pays.
Les tours, telles des doigts brisés vers les nuées,
Étiraient dans le vent leurs plaies décharnées,
Et le temps, ce sculpteur impitoyable et lent,
Avait rongé l’éclat des marbres croulants.

Son pas, tremblant ainsi qu’un feuillage automnal,
Foulait des souvenirs en un deuil éternel :
Ici, le rire clair d’un enfant évanoui,
Là, l’écho d’un serment que la cendre a enfoui.
Soudain, dans ce désert où pleurait la mémoire,
Une voix frêle éclot, semblable à l’espoir noir :
« Pourquoi pleures-tu, l’homme aux mains chargées d’années,
Sur ces débris muets où dort ta destinée ? »

Se retournant, il vit une enfant au front pâle,
Ses yeux deux diamants trouant le crépuscule,
Vêtue d’une robe en lambeaux de clarté,
Fantôme gracile né de l’adversité.
« Je pleure, dit-il, l’âme et les lèvres tremblantes,
Ces pierres qui furent ma chair et mes parentes,
Ces rêves dévorés par les siècles voraces,
Et l’amour qui s’en va lorsque meurent les places.

— Vieillard, reprit l’enfant d’un accent de cristal,
Vois-tu cette tour fendre le linceul natal ?
Demain, elle tombera, mais dans sa chute immense,
Elle engendrera l’aube au prix de sa semence.
Rien ne meurt tout à fait : le deuil est un leurre.
Le sacrifice alterne entre naître et disparaître.
Prends ma main, suis mon pas à travers ces décombres :
Je t’offre un chant nouveau né des entrailles sombres. »

Il la suivit, son cœur battant comme un tocsin,
Vers un pont écroulé, noir géant à l’affût,
Où gisait, sous les blocs, une harpe oubliée
Dont les cordes vibraient d’une plainte étouffée.
« Cette voix, murmura l’enfant aux doigts de brume,
Est celle de ton sang qui renaît sous la plume.
Pour qu’un monde refleurisse au creux de l’infortune,
Il faut qu’un vieil amour s’immole sous la lune. »

Alors, le vieil homme, saisi d’un feu sacré,
S’agenouilla, pressant l’instrument éventré :
« Prends mes jours, prends mes nuits, ô ruines sublimes !
Mais laisse en ces murs morts germer de jeunes rimes ! »
Un cri déchira l’air, suivi d’un grand silence :
La tour s’effondra, dansant sa dernière danse,
Et l’enfant, souriant tel un ange fatal,
Disparut dans la poudre aux plis de son péplum.

Quand l’aube se leva, teintant les cendres roses,
On trouva le vieillard couché sur quelque chose :
La harpe, en son giron, murmurait un adieu,
Et dans ses yeux éteints brillait un feu bleu.
La ville, autour de lui, semblait moins dévastée,
Comme si chaque pierre, à jamais visitée,
Avait bu la douleur de ce dernier soupir
Pour enfanter l’espoir… qui ne peut que mourir.

Ce poème nous rappelle que même dans les décombres, la vie trouve un chemin. Le sacrifice n’est pas une fin, mais une renaissance. Que retenons-nous de nos propres ruines ? Peut-être que, comme le vieil homme, nous devons accepter de laisser partir ce qui fut pour embrasser ce qui peut être. La douleur est un passage, et l’espoir, une promesse.
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Auteur: Jean J. pour unpoeme.fr

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