Le Dernier Éclat du Pinceau Maudit
Au cœur d’un désert sans nom, où le temps se dissout,
Un peintre nommé Lysandre errait, l’âme en déroute.
Ses toiles, jadis vibrantes de couleurs et de fièvre,
N’étaient plus que cendres sous le soleil qui crève.
Il cherchait l’inspiration, ce fantôme insaisi,
Dans l’immensité muette où tout espoir a fui.
Le sable, vaste miroir de l’éternel silence,
Dévorait ses pas fiévreux, son cœur en souvenance.
Un soir, quand l’horizon saigna pourpre et doré,
Une forme se leva, spectre démesuré :
C’était une oasis, frêle et douce chimère,
Où l’eau chantait son leurre sous les doigts de la lumière.
« Viens, » murmura le vent, « je t’offrirai des ailes,
Des paysages divins nés des lueurs nouvelles.
Ton pinceau dansera sur la toile infinie,
Et ta gloire illuminera la nuit bénie. »
Lysandre, ébloui, courut vers le mirage,
Son âme enchaînée à ce rêve qui outrage
Les lois de la raison, les frontières du réel.
Mais l’artiste, affamé, crut toucher l’immortel.
L’oasis, cependant, fuyait comme un sourire,
Et plus il avançait, plus le désert conspire :
Les palmiers n’étaient qu’ombre, les sources, amertume,
Et chaque pas creusait son tombeau qui s’allume.
Pourtant, une voix l’appelle, envoûtante, ancienne,
Celle d’une inconnue à la grâce sirennienne :
« Je suis l’Éphémère, dit-elle, muse des perdus,
Je t’enseignerai l’art dont les dieux sont déchus. »
Son visage, miroir des astres éclipsés,
Ses yeux, deux lacs de brume où naissaient les passés,
Ses mains, légères comme un souffle de poussière,
Attirèrent l’artiste au bord du précipice.
« Prends cette coupe d’or, où bouillonne l’ivresse,
Et peins avec ton sang l’ultime allégresse.
Mais gare à ton esprit, car chaque trait volé
Est un morceau de toi que le désert a scellé. »
Lysandre, envoûté, but le nectar amer,
Et sentit dans ses veines s’infuser l’éphémère.
Son pinceau dansa alors, fougueux, libéré,
Créant des cieux nouveaux où son âme exilée
Trouva refuge un temps. Les dunes, éblouies,
Se parèrent de verts, de pourpres, d’incendies.
Mais chaque coup de brosse, éclatant et sublime,
Effaçait un fragment de son essence intime.
« Regarde, » disait-elle, « comme ton art grandit
Lorsque tu sacrifies ce qui t’enchaînait hier.
Le génie est un feu qui consume son maître :
Pour brûler, il faut bien se réduire en cendres. »
Et le peintre, ravi, dans sa folle transe,
Ne voyait pas son sang se mêler à la danse.
Ses cheveux blanchissaient, ses mains, jadis si fermes,
Tremblaient comme un oiseau pris dans les neiges termes.
Un matin, il peignit un jardin de mémoire,
Où ses amours passés riaient à ses espoirs.
Mais l’Éphémère, alors, d’un geste cruel et lent,
Plongea sa main de brume au cœur du tourment.
« Ceci n’est qu’illusion, » dit-elle en déchirant
La toile où son enfance avait pleuré longtemps.
« L’art vrai naît de la perte, du renoncement sombre :
Détruis tes anciens dieux si tu veux renaître au nombre. »
Il obéit, hagard, déchira ses portraits,
Ces fragments de son âme offerts en vain secret.
Et chaque déchirure engendrait une plaie,
Un vide où se glissait la brise ensorceleuse.
Pourtant, quand vint le jour où son dernier tableau
S’éleva, radieux, comme un ultime flambeau,
L’Éphémère sourit, et d’une voix funèbre :
« Maintenant, tu es mien. Souviens-toi de ton maître. »
Le désert alors rugit, les sables en spirale
Avalèrent l’œuvre et la main triomphale.
Lysandre, réalisant l’effroyable mensonge,
Vit ses doigts disparaître dans la danse des songes.
« Pourquoi ? » cria-t-il, mais le vent sans pitié
Emporta sa voix creuse au royaume oublié.
La muse éclata de rire, et son corps de poussière
Se dispersa au loin, complice de la terre.
Il courut, mais ses pas s’enfonçaient dans l’abîme,
Chaque grain de sable était un mot du crime.
Ses toiles, autrefois trésors de passion pure,
N’étaient plus que miroirs de sa propre fracture.
À l’endroit où jadis l’oasis l’avait leurré,
Un squelette tenait un pinceau décharné.
Et le désert, sans fin, continuait de se taire,
Gardien des secrets qu’il préfère ne pas dire.
Les nuits passent, indifférentes au drame ancien,
Les étoiles y peignent un destin aérien.
Mais parfois, dit-on, quand la lune est trop pâle,
On entend une plainte sortir des sables pâles :
« J’ai vendu mon essence pour un rêve inconstant,
Trahi par ma muse, je ne suis que néant.
Ô vous qui cherchez l’art dans les gouffres du vide,
Fuyez les mirages… L’oubli est le seul guide. »
Ainsi meurt Lysandre, peintre sans sépulture,
Son nom effacé par les vents de l’altitude.
Le désert, à jamais, garde en ses flancs avares
La trace de celui qui crut dominer l’art.
Et dans les cités lointaines où ses œuvres s’étiolent,
Personne ne soupçonne à quel prix elles brillent.
Chaque coup de pinceau, chaque éclat de génie,
Est un morceau d’âme offert au démon du désert.
Un peintre nommé Lysandre errait, l’âme en déroute.
Ses toiles, jadis vibrantes de couleurs et de fièvre,
N’étaient plus que cendres sous le soleil qui crève.
Il cherchait l’inspiration, ce fantôme insaisi,
Dans l’immensité muette où tout espoir a fui.
Le sable, vaste miroir de l’éternel silence,
Dévorait ses pas fiévreux, son cœur en souvenance.
Un soir, quand l’horizon saigna pourpre et doré,
Une forme se leva, spectre démesuré :
C’était une oasis, frêle et douce chimère,
Où l’eau chantait son leurre sous les doigts de la lumière.
« Viens, » murmura le vent, « je t’offrirai des ailes,
Des paysages divins nés des lueurs nouvelles.
Ton pinceau dansera sur la toile infinie,
Et ta gloire illuminera la nuit bénie. »
Lysandre, ébloui, courut vers le mirage,
Son âme enchaînée à ce rêve qui outrage
Les lois de la raison, les frontières du réel.
Mais l’artiste, affamé, crut toucher l’immortel.
L’oasis, cependant, fuyait comme un sourire,
Et plus il avançait, plus le désert conspire :
Les palmiers n’étaient qu’ombre, les sources, amertume,
Et chaque pas creusait son tombeau qui s’allume.
Pourtant, une voix l’appelle, envoûtante, ancienne,
Celle d’une inconnue à la grâce sirennienne :
« Je suis l’Éphémère, dit-elle, muse des perdus,
Je t’enseignerai l’art dont les dieux sont déchus. »
Son visage, miroir des astres éclipsés,
Ses yeux, deux lacs de brume où naissaient les passés,
Ses mains, légères comme un souffle de poussière,
Attirèrent l’artiste au bord du précipice.
« Prends cette coupe d’or, où bouillonne l’ivresse,
Et peins avec ton sang l’ultime allégresse.
Mais gare à ton esprit, car chaque trait volé
Est un morceau de toi que le désert a scellé. »
Lysandre, envoûté, but le nectar amer,
Et sentit dans ses veines s’infuser l’éphémère.
Son pinceau dansa alors, fougueux, libéré,
Créant des cieux nouveaux où son âme exilée
Trouva refuge un temps. Les dunes, éblouies,
Se parèrent de verts, de pourpres, d’incendies.
Mais chaque coup de brosse, éclatant et sublime,
Effaçait un fragment de son essence intime.
« Regarde, » disait-elle, « comme ton art grandit
Lorsque tu sacrifies ce qui t’enchaînait hier.
Le génie est un feu qui consume son maître :
Pour brûler, il faut bien se réduire en cendres. »
Et le peintre, ravi, dans sa folle transe,
Ne voyait pas son sang se mêler à la danse.
Ses cheveux blanchissaient, ses mains, jadis si fermes,
Tremblaient comme un oiseau pris dans les neiges termes.
Un matin, il peignit un jardin de mémoire,
Où ses amours passés riaient à ses espoirs.
Mais l’Éphémère, alors, d’un geste cruel et lent,
Plongea sa main de brume au cœur du tourment.
« Ceci n’est qu’illusion, » dit-elle en déchirant
La toile où son enfance avait pleuré longtemps.
« L’art vrai naît de la perte, du renoncement sombre :
Détruis tes anciens dieux si tu veux renaître au nombre. »
Il obéit, hagard, déchira ses portraits,
Ces fragments de son âme offerts en vain secret.
Et chaque déchirure engendrait une plaie,
Un vide où se glissait la brise ensorceleuse.
Pourtant, quand vint le jour où son dernier tableau
S’éleva, radieux, comme un ultime flambeau,
L’Éphémère sourit, et d’une voix funèbre :
« Maintenant, tu es mien. Souviens-toi de ton maître. »
Le désert alors rugit, les sables en spirale
Avalèrent l’œuvre et la main triomphale.
Lysandre, réalisant l’effroyable mensonge,
Vit ses doigts disparaître dans la danse des songes.
« Pourquoi ? » cria-t-il, mais le vent sans pitié
Emporta sa voix creuse au royaume oublié.
La muse éclata de rire, et son corps de poussière
Se dispersa au loin, complice de la terre.
Il courut, mais ses pas s’enfonçaient dans l’abîme,
Chaque grain de sable était un mot du crime.
Ses toiles, autrefois trésors de passion pure,
N’étaient plus que miroirs de sa propre fracture.
À l’endroit où jadis l’oasis l’avait leurré,
Un squelette tenait un pinceau décharné.
Et le désert, sans fin, continuait de se taire,
Gardien des secrets qu’il préfère ne pas dire.
Les nuits passent, indifférentes au drame ancien,
Les étoiles y peignent un destin aérien.
Mais parfois, dit-on, quand la lune est trop pâle,
On entend une plainte sortir des sables pâles :
« J’ai vendu mon essence pour un rêve inconstant,
Trahi par ma muse, je ne suis que néant.
Ô vous qui cherchez l’art dans les gouffres du vide,
Fuyez les mirages… L’oubli est le seul guide. »
Ainsi meurt Lysandre, peintre sans sépulture,
Son nom effacé par les vents de l’altitude.
Le désert, à jamais, garde en ses flancs avares
La trace de celui qui crut dominer l’art.
Et dans les cités lointaines où ses œuvres s’étiolent,
Personne ne soupçonne à quel prix elles brillent.
Chaque coup de pinceau, chaque éclat de génie,
Est un morceau d’âme offert au démon du désert.
« `