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Bal d’Enfants
Le poème ‘Bal d’Enfants’ de Georges Rodenbach évoque avec tendresse la joie et l’innocence des enfants lors d’un bal festif. Écrit à la fin du 19ᵉ siècle, Rodenbach nous plonge dans un univers où chaque pas de danse résonne avec l’écho des rires d’enfants. Ce poème reste pertinent aujourd’hui pour sa capacité à raviver nos souvenirs d’une enfance insouciante, pleine de couleurs et de mouvements. Laissez-vous emporter par cette célébration de la jeunesse.
Une heure. Pour la table d’hÃīte On a sonné dans chaque hÃītel. Ici le sans façon est tel Qu’on met les enfants cÃīte à cÃīte. Mais aujourd’hui ces chers petits Qui les autres jours en cachette Piquaient dans les plats leur fourchette Pleins de gaÃŪtés, pleins d’appétits, Ne mangent pas de tarte aux fraises, Pas même au dessert de bonbons, Poussant des cris, faisant des bonds, Bruyants et fiévreux sur leurs chaises. Ils ont leur robe aux plis bouffants, Ils ont leur robe en mousseline, Et font leur voix la plus câline Car c’est tantÃīt le bal d’enfants. Trois heures. Enfin on se lève; Comme un dernier coup de pinceau Qu’un peintre donne à son tableau, Un dernier ruban les achève. C’est bientÃīt le moment du bal, Et comme il sied qu’on soit prodigue On prend des bouquets sur la digue Puis on entre dans le Kursaal. Les musiciens sur l’estrade Vont accorder leurs violons; Tels les oiseaux dans les vallons Quand ils commencent leur aubade. Les plus jeunes se rassemblant, Gênés dans leurs mises coquettes, Se détachent sur les banquettes De velours rouge -tout en blanc. On leur a dit de prendre garde à leurs costumes élégants; Ils mordent le bout de leurs gants Un peu troublés qu’on les regarde. Les grands garçons, les bons danseurs, S’essayent sur le parquet qui glisse; Il est mal ciré, trop peu lisse Au gré des petits connaisseurs. En robes claires, les fillettes Assises le long des sophas Ont des sourires déjà fats Quand on admire leurs toilettes. Tout ce groupe frais et changeant Va commencer bientÃīt ses rondes; à leur voir tous des boucles blondes On dirait de petits saint Jean. Ils sont impatients d’attendre, Et dans ces blonds cheveux bouclés Comme des bleuets dans les blés, Frissonnent des noeuds d’azur tendre. Enfin le signal est donné: On court, on s’appelle, on s’arrange; Et c’est une mêlée étrange où chaque couple est entraÃŪné. Beaucoup ne font que des ébauches De pas brusques, de pas pesants; Ils sont d’autant plus séduisants Qu’ils sont plus troublés et plus gauches. Ils dansent très bien les polkas Et tout en dansant ils s’embrassent; Mais dans les valses s’embarrassent Leurs pieds migrions et délicats. C’est comme un paradis terrestre Tout rempli d’anges trébuchant; Et leur voix, plus douce qu’un chant, Se mêle aux accords de l’orchestre. Soudain vibre un cri de douleur! C’est un petit couple qui tombe; On dirait un cri de colombe Prise aux filets d’un oiseleur. BientÃīt commencent des églogues Dont Virgile serait jaloux, Tant leur langage est simple et doux, Tant sont charmants leurs dialogues. L’un demande: ÂŦDansons-nous, dis?: Elle répond: ÂŦJe suis en nage.: Un autre dit: ÂŦQuel est ton âge?: -Douze ans, fait-elle. Elle en a dix. Plus loin une coquette appelle Un charmant petit cavalier: ÂŦTiens, regarde! un nouveau collier; Ne me trouves-tu pas plus belle?: ÂŦVeux-tu valser?: dit-il. -ÂŦC’est fait, Dit-elle. Je t’inscris d’avance…: Car ceux-là sont de connivence; Ils vont prendre un verre au buffet. Un autre lui lance un sourire, Puis elle inscrit sur son carnet Un nom qu’à peine on reconnaÃŪt Car elle sait à peine écrire. On crie, on se cherche partout, On rit, on se perd, on s’appelle; Pour danser on veut la plus belle Comme au jeu de cartes l’atout. Et dans la salle ensoleillée Ayant des drapeaux au plafond, Toutes ces clameurs d’enfants font Un bruit de volière éveillée. Le bruit redouble et les chansons: Marie, Eugène, Jeanne, Georges! Et l’on dirait des rouges-gorges Qui répliquent à des pinsons!… Mais ce sont les petites filles Qui font leurs plus coquets minois, Ouvrant leurs éventails chinois Pour les figures des quadrilles. Aux bras des cavaliers muets Elles ont des poses exquises; On dirait de jeunes marquises Qui dansent d’anciens menuets. Vous dites: ÂŦce sont des poupées, Il n’y a vraiment plus d’enfants!: Moi je les aime et les défends Dans leurs mignonnes équipées. Malgré les censeurs puritains Gardons ces bals pleins de chimères Pour les enfants -et pour leurs mères Qui revivent leurs jours lointains. Six heures. Encore une danse. Six heures. Le galop final. Et le chef d’un air machinal Marque aux violons la cadence. Enfin le bal est terminé!… Il en est temps, car on se lasse; Chaque enfant revient à sa place; Oh! quel joyeux après-dÃŪné!… Mais les robes sont défraÃŪchies Comme l’aile des papillons Qu’on prend l’té dans les salons où les attirent les bougies. Sept heures. On retourne enfin Le long de la digue encombrée; C’est l’heure douce où la marée Frange d’argent le sable fin. Huit heures. Chaque enfant se couche Car il se sent très fatigué; Il n’est plus vif, il n’est plus gai, Et met son pouce dans la bouche. Il danse encore, et se souvient Du bal passé, de ses valseuses, Et ses paupières paresseuses Couvrent ses yeux… le sommeil vient… Et dans sa chambre que décore Un bouquet d’oeillets odorants, La bougie aux reflets mourants Brille dans l’ombre -et danse encore!
À travers ‘Bal d’Enfants’, Rodenbach nous rappelle que la danse et l’innocence forment un lien indéfectible entre le passé et le présent. Nous vous invitons à explorer davantage ses œuvres pour découvrir des thèmes similaires d’amour et de nostalgie, et à partager vos réflexions sur ce magnifique poème.