Dieu.
Trois fois maudit
Qui le dit à présent, et l’a jamais prédit!
Maudits soient à jamais les bergers et les mages
Qui des dieux sur ma crèche ont brisé les images;
Maudits leurs yeux troublés qui virent dans les airs
Une étoile suivant ma famille aux déserts,
Des fleurs tombants du ciel sur son front, et des anges
Baisants les deux pieds nus d’un enfant dans ses langes !
Hérode a massacré le
Sauveur et le roi.
Je ne sais qui c’était, mais ce n’était pas moi.
Qui suis-je ?
Un faible enfant conçu dans le mystère
D’un songe, et mis au jour comme un fruit adultère.
Car je suis fils de l’homme, et non le fils de
Dieu.
Le
Seigneur est un pédant abstrait
Dont le silence est l’art et l’ennui le secret ,
Et de qui la voix creuse en matière d’augure
Jette des mots plus secs que sa sèche figure,
Quand il lui faut parler avec de lents apprêts.
Comme un corbeau planté sur un maigre cyprès,
Il perche nuit et jour le nez dans sa poitrine
Sur un arbre sans fruits qu’il nomme sa doctrine
Dont la racine est morte et dont la pâle fleur
Engourdit les esprits par une fade odeur.
Dans ses pieds corrompus vit l’insecte en grand nombre,
Mais jamais être pur n’a vécu sous son ombre,
Hors un triste parleur, froid, pesant et disert
Qui prend un ton d’oracle en prêchant au désert. /
Si vous lisiez la
Bible, hommes toujours distraits,
Si vous cherchiez son mot au fond de ses secrets,
Si vous alliez souvent vous asseoir à l’église,
Voir ces rêves divins qu’un prêtre réalise,
Sur l’Ancien
Testament chercher le vaste sens
Du tabernacle d’or, du livre et de l’encens,
Voir l’humble couronné sur la croix d’un supplice,
Le tombeau dans l’autel, la fleur dans le calice,
Vous sauriez que jadis sur le front des humains
Les vieillards pour dormir imposaient leurs deux mains.