quoi que cela puisse signifier pour les vivants.
À quoi bon rêver que dans cent ans
quelqu’un va lire un de tes poèmes,
que des savants tireront tes livres de rayons
plus couverts de poussière que toi tu ne le seras ?
Jamais gestes et mots ne te soulageront.
Il se peut que des histoires survivent à tes écrits :
les bergers qui t’écoutaient lire des vers aux moutons,
qui te regardaient guetter les voix venues d’un nuage.
Il y en a qui t’ont aimé. Pas pour ce que tu écrivais
mais pour cette façon dont tes yeux devenaient
d’un coup chinois si tu venais à rire ou cherchais
un sourire de commande pour les photos de famille.
Qu’importe où tu sois, pour peu que tu y sois,
tout ça, c’est choses dont tu n’entendras rien.
Même l’amour qui fend les cœurs de pierre
ne percera pas la glaise qui t’obstrue les oreilles.
Alors je travaille pour l’oubli, à écrire
ce qu’on ne lit pas, juste pour ressentir
ce que c’est qu’être mort tout en étant vivant.
Extrait de:
2007, Collected Poems, (Dedalus) – Traduit par Emmanuel Malherbet