Synchysis : Une technique rhétorique
La synchysis est une technique rhétorique dans laquelle les mots sont intentionnellement dispersés pour créer de la confusion ou pour d’autres raisons. En perturbant le cours normal d’une phrase, elle force le public à considérer la signification des mots et leur relation entre eux.
Par exemple :
- « Je cours et tire, rapidement et avec précision. »
- « Une matière trop molle pour laisser une marque durable. » – Alexander Pope, « Epistle II. To a Lady » (1743)
- « Quand les tremblements de terre engloutissent, ou quand les tempêtes balaient, des villes dans une même tombe, des nations entières dans les profondeurs. » – Alexander Pope, Essai sur l’homme.
(C’est-à-dire, « Quand les tremblements de terre engloutissent des villes dans une même tombe, ou quand les tempêtes balaient des nations entières dans les profondeurs. »)
Cette forme poétique était particulièrement appréciée des poètes latins. Le site Silva Rhetoricae la décrit comme « un hyperbate ou une anastrophe poussée à un extrême obscurantiste, soit accidentellement, soit intentionnellement. » Il est cependant douteux de pouvoir décrire des effets dans la poésie latine, qui était très soigneusement écrite, comme accidentels.
La synchysis peut être opposée au chiasme, qui est une phrase sous la forme A-B-B-A, soit dans la même ligne soit dans deux lignes consécutives. Une ligne de vers latins sous la forme adjectif A – adjectif B – verbe – nom A – nom B, avec le verbe au centre (ou une ligne chiastique correspondante, encore une fois avec le verbe au centre), est connue sous le nom de ligne dorée. C’est une occurrence très commune dans l’Énéide de Virgile, par exemple : « aurea purpuream subnectit fibula vestem », « une agrafe dorée lia son manteau pourpre » (Virgile, Énéide 4.139). En général, la synchysis se forme grâce à la structure adjectif A – adjectif B – nom A – nom B, mais elle peut également exister sous la forme adjectif-nom-adjectif-nom.
Aujourd’hui, elle se trouve principalement dans la poésie, où les poètes l’utilisent pour maintenir le mètre ou la rime.
Exemples dans la poésie latine
Catulle a notamment utilisé la synchysis dans sa poésie. Dans le poème 75, on trouve cette ligne :
« Huc est mens deducta tuā mea Lesbia culpa »
En prenant « mea » avec « Lesbia », cette ligne se lit : « À ce point, (ma) pensée est réduite par ta culpabilité, ma Lesbia. » Pourtant, la manière correcte de traduire cette ligne est de la prendre avec la plus lointaine « mens », observant ainsi la synchysis de Catulle : « À ce point, Lesbia, ma pensée est réduite par ta culpabilité. »
Un autre exemple provient d’Horace (Odes I.35, lignes 5 et suivantes), partie d’un hymne à une déesse :
« te pauper ambit sollicitā prece ruris colonus, te dominam aequoris quicumque Tyrrhenā lacessit Carpathium pelagus carinā. »
Le sens est « toi, (la maîtresse) de la campagne, le pauvre fermier te prie avec une prière anxieuse, toi, la maîtresse de l’océan, quiconque provoque la mer carpathique dans un bateau tyrrhénien (te prie) », « dominam » étant compris avec « ruris » ainsi qu’avec « aequoris ». Souvent, en raison de l’incapacité de repérer la synchysis, « ruris » est pris avec « colonus », et le vers est incorrectement traduit comme « le pauvre fermier de la campagne ».
Exemple de poème en utilisant la synchysis
Dans un jardin où l’ombre danse, la brise légère chante des refrains, les fleurs éclatantes tissent des rêves sous le ciel étoilé.
Les étoiles brillantes rendent hommage à la lune argentée qui veille sur la nuit silencieuse.
Le poème ci-dessus utilise la synchysis avec la structure adjectif-nom-adjectif-nom, illustrant la beauté et la tranquillité du jardin nocturne.