Le poème ‘Rome’ de Carlo Bordini nous plonge au cœur de la complexité de la vie dans la capitale italienne. À travers une prose évocatrice, l’auteur explore le thème de l’indifférence omniprésente des Romains face aux événements de la vie quotidienne. Écrit au 20ᵉ siècle, ce poème propose une perspective unique sur les contrastes de cette ville emblématique, où les émotions semblent s’effacer sous une couche d’indifférence. Bordini utilise une richesse d’images pour illustrer comment la beauté et la brutalité se côtoient, rendant son œuvre profondément significative pour quiconque a arpenté les rues de Rome.
Une caractÃĐristique de Rome est son indÃĐchiffrabilitÃĐ. Câest comme si Rome ÃĐtait recouverte dâune gaine souple, ÃĐlastique, qui empÊche de voir avec prÃĐcision ses traits, cache au regard ses angles aigus, rend tout uniformÃĐment doux, rond, mucilagineux. Tout y devient inexpressif, hypnotiquement inexprimÃĐ, comme un corps recouvert dâune couche de gras qui cache ses formes.
Toutes les manifestations dâune ville -la stupiditÃĐ des gens ou leur intelligence, la violence, le danger, etc. etc.- sont attÃĐnuÃĐes à Rome, presque effacÃĐes ou du moins recouvertes par ce leurre gluant. Les Romains ne sont pas gentils, mais ils ne sont pas exempts dâune certaine cordialitÃĐ. Il ne sont pas brutaux. Certains dâentre eux -hommes, secteurs- le sont certainement, mais une pareille brutalitÃĐ est cachÃĐe par lâindiffÃĐrence de la ville. La ville comme couverture. La caractÃĐristique principale et commune du Romain est en effet son indiffÃĐrence, qui se marie à un scepticisme dÃĐsormais atavique. Un Romain ne croit pas dans la rÃĐalitÃĐ, il nâÃĐprouve pas de sentiments forts, dâÃĐmotions fortes ou de dÃĐsirs forts; il est gÃĐnÃĐralement sympathique, caractÃĐrisÃĐ par une humour je-mâen-foutiste qui est lâemblÃĻme de toute la ville. Une rÃĐplique de La dolce vita disait: Rome est un excellent endroit pour se cacher. Câest une caractÃĐristique de nâimporte quelle grande ville, mais se cacher à Rome est particuliÃĻrement doux, entre lâindiffÃĐrence des gens, et la vie facile de ses trattorie. On ne perçoit jamais le danger à Rome, tout comme la mort; à Rome on peut Être agressÃĐs sans sâen apercevoir, parce que tout rebondit sur la consistance caoutchouteuse de cette ville. On meurt sans sâen apercevoir, et sans que les autres nây prÊtent attention, non par cynisme (le cynisme prÃĐsuppose des passions, de la haine, de lâambition, qui manquent à Rome) mais par indiffÃĐrence. Le Romain nâest certes pas dâun dynamisme fanatique, il nâa pas non plus lâindolence fÃĐline des Napolitains. Rome est le lieu idÃĐal pour vivre seuls et pour mourir seuls, sans que cette solitude nâacquiÃĻre rien de dramatique ; au maximum elle peut Être ennuyeuse (Rome pour nâÊtre pas stimulante, nâest pas non plus une ville vÃĐritablement ennuyeuse, comme peut lâÊtre une ville de province). à Rome, en revanche, les sens sâÃĐmoussent. à Rome il manque aussi la peur, qui dure une seconde, aprÃĻs quoi on revient à une joyeuse et charnelle indiffÃĐrence. Loin de la terreur, Rome peut Être la ville de la dÃĐpression â des chroniques, douces crises dÃĐpressivesâĶ
Mais dans le mÊme temps Rome a une qualitÃĐ : ÃĐtant une ville fantÃīme, une ville imaginaire, somnambule, elle peut bÃĐnÃĐficier de grandes et calmes hallucinations. Une personne à Rome pourrait feindre dâÊtre idiote et vivre une vie cachÃĐe, marginale et succomber sous le poids de fautes ancestrales, trÃĻs anciennes.
Toutes les manifestations dâune ville -la stupiditÃĐ des gens ou leur intelligence, la violence, le danger, etc. etc.- sont attÃĐnuÃĐes à Rome, presque effacÃĐes ou du moins recouvertes par ce leurre gluant. Les Romains ne sont pas gentils, mais ils ne sont pas exempts dâune certaine cordialitÃĐ. Il ne sont pas brutaux. Certains dâentre eux -hommes, secteurs- le sont certainement, mais une pareille brutalitÃĐ est cachÃĐe par lâindiffÃĐrence de la ville. La ville comme couverture. La caractÃĐristique principale et commune du Romain est en effet son indiffÃĐrence, qui se marie à un scepticisme dÃĐsormais atavique. Un Romain ne croit pas dans la rÃĐalitÃĐ, il nâÃĐprouve pas de sentiments forts, dâÃĐmotions fortes ou de dÃĐsirs forts; il est gÃĐnÃĐralement sympathique, caractÃĐrisÃĐ par une humour je-mâen-foutiste qui est lâemblÃĻme de toute la ville. Une rÃĐplique de La dolce vita disait: Rome est un excellent endroit pour se cacher. Câest une caractÃĐristique de nâimporte quelle grande ville, mais se cacher à Rome est particuliÃĻrement doux, entre lâindiffÃĐrence des gens, et la vie facile de ses trattorie. On ne perçoit jamais le danger à Rome, tout comme la mort; à Rome on peut Être agressÃĐs sans sâen apercevoir, parce que tout rebondit sur la consistance caoutchouteuse de cette ville. On meurt sans sâen apercevoir, et sans que les autres nây prÊtent attention, non par cynisme (le cynisme prÃĐsuppose des passions, de la haine, de lâambition, qui manquent à Rome) mais par indiffÃĐrence. Le Romain nâest certes pas dâun dynamisme fanatique, il nâa pas non plus lâindolence fÃĐline des Napolitains. Rome est le lieu idÃĐal pour vivre seuls et pour mourir seuls, sans que cette solitude nâacquiÃĻre rien de dramatique ; au maximum elle peut Être ennuyeuse (Rome pour nâÊtre pas stimulante, nâest pas non plus une ville vÃĐritablement ennuyeuse, comme peut lâÊtre une ville de province). à Rome, en revanche, les sens sâÃĐmoussent. à Rome il manque aussi la peur, qui dure une seconde, aprÃĻs quoi on revient à une joyeuse et charnelle indiffÃĐrence. Loin de la terreur, Rome peut Être la ville de la dÃĐpression â des chroniques, douces crises dÃĐpressivesâĶ
Mais dans le mÊme temps Rome a une qualitÃĐ : ÃĐtant une ville fantÃīme, une ville imaginaire, somnambule, elle peut bÃĐnÃĐficier de grandes et calmes hallucinations. Une personne à Rome pourrait feindre dâÊtre idiote et vivre une vie cachÃĐe, marginale et succomber sous le poids de fautes ancestrales, trÃĻs anciennes.
Ce poème de Carlo Bordini nous invite à réfléchir sur notre propre relation avec les lieux que nous habitons et sur la manière dont l’indifférence peut façonner nos expériences. N’hésitez pas à explorer d’autres œuvres de cet auteur ou à partager vos impressions sur le poème.